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[LONDRES] Ed Atkins à la Serpentine Gallery

[LONDRES] Ed Atkins à la Serpentine Gallery

07 July 2014 | PAR Yaël Hirsch

Le vidéaste anglais Ed Atkins, actuellement à l’affiche du Palais de Tokyo (voir notre article) et dont nous avons pu voir une performance au cœur de “14 rooms” à la Foire de Bâle (voir notre article) investit un des deux espaces de la Serpentine Gallery, au cœur de Hyde Park.  L’artiste a pensé spécialement pour le lieu une scénographie sombre et fantomatique mettant en scène la réalité augmentée d’une condition humaine damnée… 

[rating=5]

Pour ceux et celles qui ne pourraient entrer – car trop d’affluence- aux 512 hours de performance de Marina Abramovic, ne ressortez pas de Hyde Park dépités ! Traversez le pont et investissez la Serpentine Sackler Gallery pour entrer dans l’univers à la fois bestial et mystique du vidéaste Ed Atkins.

C’est spécialement pour le bâtiment que l’artiste à repensé ses vidéos “Ribbons” (2014), très similaires à celles du palais de Tokyo par leurs thèmes (la condition humaine en dépression très fluide, incarnée par l’avatar vidéo de Atkins), leurs motifs musicaux (le “Erbarme dich” de la Passion selon Saint-Matthieu et “I think it’s going to rain” de Randy Newman), et leur dispositif (les vidéos se répondent  visuellement, créant un univers sonore brutal en écho).

Le nombre est aussi le même, trinitaire, mais cette fois-ci deux des vidéos sont enserrées dans les entrailles en brique de la Serpentine… Ce qui donne un caractère encore plus fantomatique et noir à l’exposition. Surtout qu’autour des trois vidéos se déploient deux écrans plasma qui mettent en scène une décapitation. Il y a aussi de grandes planches de textes représentant des morceaux de corps explicités par du texte. Au Palais de Tokyo ils faisaient office d’édito. A la Serpentine ils sont des bornes de parcours.

Ainsi, malgré le carré des écrans, des briques et des cadres, l’installation de Ed Atkins à la Serpentine est aussi circulaire qu’un cercle de l’enfer de Dante. C’est dans cet univers rond et sans sortie que le vidéaste déploie ce que le critique Mike Sperlinger nomme avec justesse son “inflation”, qui est à la fois charnelle, spirituelle, et narcissique. Inflation et spiritualités sont totalement décalées en période de restriction économique et de minimalisme. Mais, paradoxalement, et avec toute la noirceur de la bête qui hurle, elles offrent un peu d’air frais et de matière vivante à réflexion. A noyer dans beaucoup d’instinct et de whisky, bruit des glaçons compris!

A noter : Ed Atkins organise un vrai symposium à l’ancienne (au sens étymologique : on devrait beaucoup boire ou voir boire) dans le cadre des Serpentine Park nights, le vendredi 11 juillet à 20h. (prix : 5 livres)

Visuel : “Stills from the three-channel HD vidéo Ribbons” (2014) (c) 2014 Ed Atkins.

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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