Théâtre
<em>The End</em>, une coïncidence tunisienne

The End, une coïncidence tunisienne

12 November 2011 | PAR Justine Hallard

Le Théâtre Jean Vilar de Vitry-sur-Seine accueille du 6 au 29 novembre les Plateformes des arts en Méditerranée « Al Wassl ». À l’heure des premières récoltes du Printemps arabe, voici l’opportunité d’aborder (enfin) l’actualité sous le regard des artistes de l’autre rive de la Méditerranée, « ce continent liquide aux frontières solides », selon la jolie formule consacrée à Fernand Braudel. Ainsi la Tunisie, la Syrie, la Palestine et l’Égypte ont traversé le pont, pour venir partager leurs histoires théâtrales ou musicales bien entendu… mais aussi un petit bout d’Histoire, avec un grand H cette fois-ci.

 

Petit tour du côté de The End, la pièce tunisienne de Leïla Toubel et Ezzedine Gannoun (Théâtre El Hamra)

Drôle de coïncidence que ce titre, The End, pour ce spectacle créé en 2009 comme prémonition à ce renouveau de l’année 2011. Et il s’agit bien ici de l’ultime fin, celle de Nejma, à qui la mort vient lui annoncer une heure à l’avance son grand départ. L’heure du bilan a sonné. Le sien bien sûr, avec son lot de douleurs et de réalisations personnelles, mais aussi le prétexte à parler du fond : de la révolte de cette insoumise qui en découd avec sa propre société patriarcale et de toutes les contradictions de cette société-même un peu à part dans le monde musulman.

Les quatre autres personnages en seront le miroir : Dada la bonne, femme du peuple bien sûr, victime des hommes tout comme de ses programmes télé abrutissants ; Ali, le petit frère qui rêve de devenir star de hip hop pour crier les mots « interdits », ou tout du moins de « faire le buzz » … puis les morts qui ressurgissent : le père que les remords ne rongent pas beaucoup, et le fiancé défunt qui se ravit de la mort à venir de Nejma.

Bien que le sujet puisse paraître un peu sinistre, l’écriture parsemée d’humour et éclairée de dérision de Leïla Toubel donne une toute autre tournure au spectacle. Une vraie plongée au cœur de la vie, de celle des Tunisiens en particulier. Un regard juste sur cette société complexe à laquelle Nejma criera « Je t’aime mon pays malgré tout ! ».

Ezzedine Gannoun quant à lui sert au texte une mise en scène épurée où le chant d’Alia Sallami prend toute son envolée dans ce décor dépouillé. Mais c’est le texte, plus que le jeu, qui donne à la pièce toute sa force, donné en dialecte tunisien, riche d’emprunts au français, et mélodieux de toutes ses influences méditerranéennes. Et pourtant, c’est ce texte-même, compréhensible par sur-titrage en fond de scène qui se donne si difficilement aussi au spectateur, jusqu’à lui en faire décrocher du jeu… et donc des acteurs, surtout lorsque la fin devient plus longue et rugueuse. Mais il n’empêche que les questions traversées par The End restent d’une étonnante actualité. La pièce mériterait de tourner davantage sur les scènes françaises pour que l’écho des prémices du Printemps puisse continuer à se faire entendre !

 

Texte : Leïla Toubel
Mise en scène : Ezzedine Gannoun
Avec : Leïla Toubel, Bahri Rahali, Rym Hamrouni, Bahram Aloui et Ousama Kochkar

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