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L’impressionnisme colore les rues de Rouen

L’impressionnisme colore les rues de Rouen

14 July 2020 | PAR Laetitia Larralde

La saison 2020 de Normandie impressionniste s’est ouverte début juillet avec un programme riche sur tout le territoire normand. A Rouen, ce n’est pas moins de neuf expositions et projets artistiques qui inaugurent la saison.

Placée sous le thème de la couleur au jour le jour, cette quatrième édition de Normandie Impressionniste est ouverte à la fois sur les disciplines et sur les époques abordées. Peinture, photographie, mode ou céramique, du XIXème siècle à nos jours, le programme est vaste pour fêter les dix ans du festival.

Le musée des Beaux-Arts : focus sur les collectionneurs

L’exposition principale de Rouen est sans douter celle consacrée à François Depeaux, collectionneur compulsif et homme d’affaire rouennais à la vie digne d’une série télé. Acteur important tant au sein de l’impressionnisme que pour la ville de Rouen, cette exposition est la première qui lui est consacrée. Achetant par dizaines les tableaux des maîtres tels que Monet (il fut le premier à acheter une de ses Cathédrale de Rouen), Sisley, Pissarro, Renoir ou même Toulouse-Lautrec, il fut un soutien et ami incontestable des peintres.

S’intéressant par la suite à l’école de Rouen, il joua le rôle de mécène pour Albert Lebourg, Joseph Delattre ou encore Robert Pinchon, en faisant leur promotion jusqu’au Pays de Galles. Grâce à la donation de cinquante-trois toiles qu’il fit à la ville de Rouen en 1909, il contribua à mettre en lumière l’impressionnisme. Pour aller plus loin, deux salles du musée sont consacrées à Léon-Jules Lemaître, l’un des peintres de l’école de Rouen. L’exposition regroupe une série de vues de Rouen dans des formats souvent très allongés correspondant aux rues étroites de la ville.

Au sein de la collection permanente du musée se trouvent trois contrepoints contemporains : Claire Tabouret, Jean-Baptiste Bernadet et Nymphéas noirs, les planches de la bande-dessinée de Didier Cassegrain et Fred Duval, adaptée du roman de Michel Bussi. Claire Tabouret et Jean-Baptiste Bernadet nous montrent la continuité de l’impressionnisme dans la création contemporaine. Si la filiation se retrouve dans l’usage de la couleur chez les deux artistes, le très beau polyptique de Jean-Baptiste Bernadet fait immédiatement appel à l’impressionnisme par sa touche, sa palette et la vibration de ses toiles.

Enfin, le musée des Beaux-Arts présente les photographies d’Antonin Personnaz, lui aussi collectionneur d’art impressionniste. Avec ses autochromes, procédé des Frères Lumière permettant de photographier en couleur, il s’ingénie à démontrer que cette technique permet aussi de créer des œuvres impressionnistes. Les tirages rétro-éclairés de ses paysages, exposés pour la première fois depuis leur création, brouillent d’une façon surprenante la frontière entre peinture et photographie. Un reportage entre nostalgie et modernité, d’une grande poésie.

Le muséum d’histoire naturelle : botanique et peinture

La passion de Claude Monet pour son jardin de Giverny est connue de tous. Ce qui l’est moins, c’est son lien à l’étude botanique par le biais de son beau-fils Jean-Pierre Hoschedé. Le musée présente des planches de son herbier récolté à Giverny, en regard des tableaux de sa sœur Blanche et de Monet. Les tableaux donnent les couleurs et les herbiers rapportent fidèlement la forme des plantes, créant ainsi une vision complète des espèces que l’on trouvait en Normandie. On remarquera aussi le pavot de Monet, papaver monetii, hybride aujourd’hui disparu.

La corderie Vallois : la mode impressionniste

Les impressionnistes rendaient avec précision les tenues de leurs modèles, dans cette volonté de témoigner de la modernité de leur époque. Dans cette ancienne fabrique de cordes et de lacets, au sein de la vallée du Cailly où la production textile fonctionnait presque en autarcie (le frère de Claude Monet y avait son usine de colorants textiles), les tenues reviennent à leur source.

Mises en regard de reproductions de toiles impressionnistes, les toilettes féminines et masculines parlent d’une époque inventive et très codifiée. Entre légèreté de la gaze de Chambéry et entrave des corsets et crinolines, la mode avait de quoi occuper les pensées. Si les hommes se changent trois fois par jour et les femmes jusqu’à six, la mode se complexifie encore par l’apparition de tenues de loisirs tels que le bain, la randonnée ou l’équitation.

On découvre ici les multiples astuces des tenues et accessoires ainsi que l’industrialisation de la production et les innovations commerciales qui préfigurent la mode contemporaine, plusieurs épaisseurs de tissus en moins.

La saison Normandie impressionniste se complète à Rouen d’une exposition sur Camille Moreau-Nélaton, femme céramiste à la production entre impressionnisme et japonisme, ainsi que d’une collection de catalogues très complets. Et une fois la nuit tombée, profitez des illuminations de la cathédrale dont l’une des parties est dédiée à l’impressionnisme.

 

François Depeaux, l’homme aux 600 tableaux
Léon-Jules Lemaître, par les rues de Rouen
La vie en couleurs : Antonin Personnaz, photographe impressionniste
Claire Tabouret
Jean-Baptiste Bernadet
Nymphéas noirs
Musée des Beaux-Arts de Rouen

L’herbier secret de Giverny, Monet et Hoschedé en botanistes
Muséum d’histoire naturelle – Rouen

Crinolines et chapeaux, la mode au temps des impressionnistes
Musée industriel de la Corderie Vallois – Notre-Dame-de-Bondeville

Du 11 juillet au 15 novembre 2020

Visuels : 1- Antonin Personnaz, Le peintre Armand Guillaumin peignant “Baigneurs à Crozant”, vers 1907 – Plaque Autochrome Paris, Société française de photographie / 2- Claude Monet, Portail de la cathédrale de Rouen, temps gris, 1893. © RMM Rouen Normandie / Musée des Beaux-Arts / 3- Papaver Moneti, 30 juin 1897, Eure, Giverny, dans le jardin de M. Claude Monet où cet hybride s’est produit naturellement / 4- Jean-Baptiste Bernadet, Untitled (Fugue, Rouen), extrait, 2019 – Courtesy of the artist and Almine Rech ©Photo : Hugard & Vanoverschelde / 5- Ernest Ange Duez, L’heure du bain au bord de la mer, 1896 © C. Lancien, C. Loisel /Réunion des Musées Métropolitains Rouen Normandie

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Laetitia Larralde
Architecte d'intérieur de formation, auteure de bande dessinée (Tambour battant, le Cri du Magouillat...)et fan absolue du Japon. Certains disent qu'un jour, je resterai là-bas... J'écris sur la bande dessinée, les expositions, et tout ce qui a trait au Japon. www.instagram.com/laetitiaillustration/

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