Voyage
Suisse, partie 3 : Thoune, Lucerne et Bâle

Suisse, partie 3 : Thoune, Lucerne et Bâle

18 September 2020 | PAR Katia Bayer

Après Berne et Neufchâtel (partie 1), le Pays-d’Enhaut, Gruyères et Fribourg (partie 2), Toute la Culture vous emmène pour ce dernier chapitre helvétique dans pas moins de trois endroits formidables : Thoune, Lucerne et Bâle.

1. Thoune

Thoune, jolie ville pavée, accueille des magasins bio, des petites boutiques de vêtements et des surfeurs testant leurs capacités à affronter les vagues aux portes des écluses. Comme à Berne, on peut y nager, sous la pluie, porté par le courant et même cueillir des mûres le long du chemin du Flussbad Swäbis. Autre option : se changer en pleine rue pour sauter dans le Rhin, découvrir la ville en nageant sous ses ponts, sortir de l’eau et manger la meilleure glace au chocolat de sa vie dans une guinguette, aux côtés d’un type en maillot très moulant et aux lunettes délirantes. Puis, revenir dans le centre-ville, en bus avec les cheveux mouillés.

Beaucoup de gens parlent de Thoune avec des yeux amoureux. La ville est résolument charmante avec son allée principale, ses magasins installés sur deux niveaux, en hauteur et en contrebas, permettant plusieurs balades, dans un sens comme dans l’autre. On admire les bouquets de fleurs colorés du marché, on craque pour de la vaisselle en bambou coloré, on déclare ses meilleures intentions à une mozzarella burata, on lève la paupière devant une boutique dédiée aux chats où ceux-ci se déclinent en mugs, sacs, rideaux et autres coussins.

2. Lucerne

Cap sur Lucerne. Au KKL, la salle de spectacle créée par Jean Nouvel, Martha Enrich joue Beethoven au piano tandis que l’orchestre de Lucerne suit les directives du chef Herbert Blomstedt. On cherche désespérément de quoi faire passer la fatigue du voyage avant de tomber sur le restaurant de sushis Negishi. Les assemblages sont étonnants, on est loin, très de la fondue de spécialité des premiers jours en Suisse. Le lendemain, on s’installe au Tabuca, un lieu cool où les méridiennes riment avec les cafés de spécialité. Son gérant Manolo vient du Salvador. Passionné et loquace, il parle de son goût pour la Suisse en gardant un oeil affectueux sur son petit “amor”, sa fille de 5 ans.

Après un tour à l’Office du Tourisme d’où on ressort avec une médaille en chocolat aux couleurs de la ville (c’est bon, on est à nouveau un enfant !), on part découvrir la Collection Rosengart qui doit son nom à celui d’Angela Rosengart, fille unique d’un collectionneur suisse, Siegfried Rosengart. Sur la façade, les noms des peintres modernes s’affichent. Le musée permet en effet d’admirer de nombreux Picasso et Klee mais aussi des Matisse, Modigliani, Renoir, Chagall,  Une bonne façon de terminer la journée après un tour au lac des Quatre-Cantons proche de Lucerne, où la baignade s’effectue dans une eau transparente, face aux montagnes grâce à une petite échelle en fer romantique.

Après le musée, on met le cap sur la jolie synagogue de Lucerne où Meir Shitrit nous accueille. Cet avocat israélien habitant en Suisse depuis de nombreuses années nous parle de la communauté juive locale, petite mais soudée. Aucune aide de la ville ne la soutient et pourtant, elle tient le coup grâce à ses membres. Meir parle de la vie juive compliquée à Lucerne (pour se nourrir et étudier, il faut se render en voiture à Zurich) mais reste résolument positif : la vie en Suisse est chère mais paisible.

On part visiter la vieille ville tout bonnement magnifique. Les peintures murales aux couleurs chaudes ornent les maisons, les figures grandeur nature donnent du cachet aux façades, semblant raconter une histoire continue d’édifice en édifice. Pour passer d’une rive à l’autre, on emprunte les ponts en bois recouverts de peintures pour le coup plus sombres. Ici, le Covid semble bien loin tant les touristes, suisses pour la plupart, se délectent à franchir les ponts dans un sens comme dans l’autre. On finit la visite de Lucerne par une balade en ville où les vitrines sont décorées avec humour, comme à Bern, à l’image de cette pharmacie du centre qui accueille un cortège de grenouilles décalées.

3. Bâle

Parmi les villes incontournables de la Suisse, Bâle occupe une bonne position. Sa vieille ville est charmante, ses petites boutiques installées dans les hauteurs rivalisent de sympathie et artistiquement, la ville n’a pas trop besoin de lorgner du côté de la France ou de l’Allemagne. Son musée de la BD (le Cartoonmuseum) accueille par exemple en ce moment l’artiste belge Brecht Evens qu’on aime beaucoup.

Parmi les autres musées de Bâle, on a un gros faible pour le Kunstmuseum. Si l’exposition temporaire – les photos de Ruth et Peter Herzog – nous parle peu, la collection permanente y est tout bonnement exceptionnelle. Matisse, Modigliani, Picasso, Rousseau, Chagall, Léger, Miró, Renoir, Warhol, Calder, … : les étages consacrés à la peinture du XXème accueillent bon nombre de chefs d’oeuvre qui méritent de prendre vraiment le temps pour les admirer. Le lieu est immense et il faut un temps d’adaptation pour se repérer dans ses espaces, prenant ici un ascenseur et enchaînant là les salles avant la fermeture.

Impossible de se rendre à Bâle bien évidemment sans faire un arrêt à la magnifique Fondation Beyeler, installée à l’extérieur de la ville. Le tram permet d’y accéder, des champs entourent les lieux. La fondation est entourée d’un jardin agréable où il est possible de s’installer en terrasse ou sur l’herbe, tous les mercredis d’été.

La singularité de la fondation, c’est justement qu’elle se trouve en pleine nature et qu’elle se fond dans l’espace. Une sensation de quiétude envahit les visiteurs, souhaitant faire une pause avec la ville, le bruit, la pollution. Devant le musée, se trouve une petite mare envahie de nénuphars. Des ruches sont même visibles à proximité du musée, dans les champs. A l’intérieur, la transparence fusionne avec les grandes fenêtres, ce qui permet de prolonger le regard sur le monde extérieur. Résultat : on est bien.

L’exposition en place jusqu’au 20 septembre est consacrée au peintre américain Edward Hopper qui avait été mis à l’honneur en 2013 au Grand Palais à Paris. Plusieurs salles de la fondation offrent la place qu’il se doit aux toiles magnifiques de Hopper, certaines ultra connues, d’autres bien moins. Les couleurs sont fortes et chaudes, offrant par ci par là du relief aux portraits et aux paysages capturés par le pinceau de l’artiste. Dans The Camel’s hump (1921), la montagne représentée semble sortir du tableau. Dans Lighthouse hill (1927), le bleu de la mer est foudroyant.

Hormis les tableaux, les dessins et croquis, notamment de l’épouse du peintre, retiennent l’attention. Là encore, les couleurs sont là, précises et intenses. L’exposition se termine avec “2 ou 3 choses que je connais sur Hooper”, une installation de Wim Wenders. Muni de lunettes 3D, on découvre à distance les uns des autres un court-métrage du réalisateur inspiré des toiles du maître.

La visite de la fondation se termine avec celle de l’exposition temporaire qui présente plusieurs Giacometti, Monet (Le bassin aux nymphéas est une gigantesque toile qui fait écho avec l’entrée du musée), Warhol, Picasso, Léger, … Cette exposition temporaire fait partie des collections du musée. Le fonds est énorme, une partie seulement est exposée. D’autres oeuvres issues du fonds seront prochainement à voir sur place car l’exposition qui aurait dû succéder à celle de Hopper est pour l’instant repoussée au vu de la situation mondiale. L’oeuvre de Goya, le génial peintre espagnole aurait dû succéder à celle de Hopper.

On termine la visite de la ville avec le Zoo de Bâle, également accessible en tram, petite parenthèse décalée parmi d’autres. On est séduit par ses manchots regroupés et gourmands et ses singes espiègles et intelligents. Sans détour, un retraité, habitué des lieux, appareil photo à longue focale à la main, énonce des “Come, come” mystérieux. Il se penche et montre du doigt une vitrine. Un bébé crocodile est installé tranquillement sur un bout de bois flottant dans l’eau. Magie.

4. Retour à Berne

Le voyage s’achève avec un retour à Berne. On repart flotter dans le Rhin avec son nouveau copain, le sac imperméable (voir partie 1). On y fait la connaissance de Nick dont Mabrouk le chien espiègle, s’en donne à coeur joie dans l’eau. Nick, grand-père sans téléphone portable nous invite à venir manger une fondue chez lui (rendez-vous pris : on manque de temps, on a une excellente raison de revenir !). Le long du rivage, des vaches paissent tranquillement tandis qu’un veau, né quelques jours plus tôt, tente de prendre de l’assurance en se tenant maladroitement sur ses pattes.

Les derniers moments du voyage se déroulent au Rosengarten, un jardin situé dans les hauteurs où les points de vue sur la ville et les très nombreuses roses sont plus que canons et au Bärengraben, la fosse aux ours installée le long de l’eau où cette fois-ci, par chance, on arrive enfin à voir pas moins de cinq bêtes majestueuses. L’enfant médaillé en nous n’a pas bougé d’un petit pouce.

Katia Bayer

Remerciements : Letizia Robbiani (Suisse Tourisme), Sabrina Bregy (Office du Tourisme de Luzerne), Meir Shirit (Synagogue de Lucerne), Karen N. Gerig (Kunstmuseum Basel), Jan Sollberger (Fondation Beyeler), Franziska Viscardi (Zoo de Bâle)

Avec “Femmes puissantes”, la journaliste Léa Salamé dévoile son panthéon féminin
Benjamin Levy : « La covid met en cause l’imitation du modèle »
Katia Bayer

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration