
Journal d’une machine : une pièce étourdissante
Matsuo Suzuki est un auteur atypique. Très populaire au Japon, ses pièces, relativement difficiles à traduire, sont bourrées d’humour et de références typiquement nipponnes. Aussi, ce fut une grande première pour la Maison de la Culture du Japon à Paris et son public d’accueillir Journal d’une machine et son auteur du 25 au 27 avril 2013.
Tout débute une nuit de tempête. Dans un préfabriqué de la petite usine familiale, un drame se produit. Michio, le plus jeune fils de la famille, agresse Sachiko, une jeune ouvrière. Un an plus tard, Michio est enchaîné, contraint d’expier sa faute, et son grand frère, afin de racheter son crime, à épouser la victime. Ce climat familial plus qu’atypique et dérangeant est bouleversé par l’arrivée d’une nouvelle employée, une femme d’âge mûr, passionnée par les machines. Ainsi, dans la fournaise de l’été et le vacarme des machines, les sentiments et les frustrations explosent.
Journal d’une machine est un huis clos familial décalé où les névroses de chacun réapparaissent les unes après les autres. Tour à tour victimes et bourreaux, sains d’esprit ou inquiétants, les personnages s’affrontent, se confrontent et s’intimident. Déni, résignation, rébellion et folie s’entrecroisent dans cette frénésie bruyante et désespérée portant sur la norme physique et sociale et son importance dans la société nippone, de même que sur la persécution et la hiérarchie sociale.
A la fois déstabilisante et originale, la pièce, à mi chemin de la comédie musicale dévoyée et servie par un décor et une mise en scène soignés, ne laisse personne de marbre. Saluons la performance des quatre acteurs, également remarquables et notons que les deux heures dix de spectacle passent très rapidement.
Félicitons également l’allocution en français de l’auteur-metteur en scène venu présenter sa pièce en personne.
Visuels : © NOBUHIKO HIKIJI