Théâtre
Fraternité, ce qu’il reste de l’humanité par Caroline Guiela Nguyen au Festival d’Avignon

Fraternité, ce qu’il reste de l’humanité par Caroline Guiela Nguyen au Festival d’Avignon

15 July 2021 | PAR Amelie Blaustein Niddam

À la FabricA, la metteuse en scène de Saigon appuie une nouvelle fois sur la corde sensible pour un spectacle comme une série, sur une des fins du monde possibles.

Kitsch assumé

Nous sommes dans un décor complètement étrange, quelque part entre la cafèt’ d’Hélène et les Garçons (les plus jeunes chercheront sur internet !) et une salle municipale quelque part et partout dans le monde. Dan Artus, Saadi Bahri, Boutaïna El Fekkak, Hoonaz Ghojallu, Maïmouna Keita, Nanii, Elios Noël, Alix Petris, Saaphyra, Vasanth Selvam, Anh Tran Nghia, Hiep Tran Nghia et Mahia Zrouki sont une légion. Ils ont tous les âges, toutes les couleurs, tous les accents… Ce que met au plateau Caroline Guiela Nguyen, c’est la réalité de la diversité du peuple humain.

Il y a donc des murs pastel, des chaises colorées, et d’un côté un espace, qui est une cabine à messages, et de l’autre des écrans qui disent la galaxie. Et l’histoire se met en place. C’est comme chez Murgia, une dystopie, comme si le covid nous imposait de penser plus loin que le futur.

Suspens fou

L’histoire est folle et elle se regarde vraiment comme une série Netflix, on a très envie de connaître la fin dont on ne vous dira rien ! Ce conte raconte le jour où à la suite d’une éclipse du soleil, la moitié de l’humanité a disparu. Ceux qui restent cherchent à entrer en contact avec eux, mais voilà, le poids de leur peine, le vide de leur cœur pèsent tellement lourd que cela empêche les planètes de tourner. Que c’est beau ça.

Ce que l’on peut reprocher au spectacle c’est l’injonction à l’empathie. On regrette le jeu des comédiens tire-larmes, voix qui chevrotent et yeux humides. Pour dire la peine, cela ne sert à rien de la montrer, elle se vit, se transmet, se ressent, et cela, sans sous-titre nécessaire. Elle veut nous faire pleurer, elle veut que nous portions ces âmes comme en coma. Que faut-il faire ? Un deuil sans corps ? La Shoah et aujourd’hui les morts en mer des migrants nous ont bien appris à faire ça. Ou au contraire continuer à attendre, en tentant de faire cela de façon supportable ? Telle est la grande question que pose la pièce : que faire d’un mort qui n’est pas vraiment mort ? Comment faire avec ceux qui disparaissent, les déments, les endormis, il faut opérer par couche, accepter, laisser filer et retenir un peu. C’est ce que cette communauté va faire…

Selon nous, la question n’est pas due tellement à l’émotion, mais au fond, qui est vraiment génial, autant que la pilule qui annule le besoin de dormir chez Murgia, cette idée d’une planète vraiment connectée, où le monde écrasé par l’horreur fait corps commun, est superbe. Mais  le covid nous a appris cela, ce n’est pas près d’arriver. Et ça pour le coup, ça donne vraiment envie de chialer.

La pièce s’est donnée jusqu’au 14 juillet au Festival d’Avignon. Elle sera du 16 septembre au 17 octobre à l’Odéon-Théâtre de l’Europe (Paris)

Visuel :  © Christophe Raynaud de Lage/Festival d’Avignon

 

 

 

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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