
Les danses merveilleuses de Chaignaud et Carvalho au Festival d’Automne
Au Théâtre de la Ville, dans le cadre du Festival d’Automne, la compagnie Dançando com a Diferença a invité Tânia Carvalho et François Chaignaud à offrir un autre regard, nécessaire, sur l’acte de danser.
C’est avec un immense plaisir que nous retrouvions Bárbara Matos, Bernardo Graça, Joana Caetano, Mariana Tembe, Milton Branco, Sara Rebolo, Sofia Marote et Telmo Ferreira sur la scène de Chaillot pour ÔSS de Marlene Monteiro Freitas. Depuis 2001, sous la direction artistique d’Henrique Amodeo, cette compagnie inclusive permet de décaler notre regard sur le handicap pour qu’il ne soit plus mis au ban de nos sociétés.
En matière de société, François Chaignaud en fabrique une sur mesure, élégante et snob à souhait. Pour Blasons, il s’est amusé à réactiver un genre poétique en faveur au XVIe siècle qui trouve aujourd’hui son pendant dans le langage populaire avec le mot “blase”! C’est tout simplement une description détaillée d’un être ou d’un objet dont on fait l’éloge ou la satire.
Ils et elles sont merveilleusement habillé.e.s, tous et toutes en noir, leurs corps sculptés par les vestes structurées d’Henrique Teixeira. Ils et elles entrent et sortent, nous toisent sans relâche en nous ordonnant de les regarder dans les yeux. Chaignaud pose la question : qu’est-ce que tu regardes? Certainement pas des exclu.e.s ou des malades. On voit une communauté sûre d’elle et sans tabou. Les images sont d’une beauté absolue, particulièrement quand le groupe fait communauté dans la communauté en se mettant au même niveau que Mariana Tembe qui vit sans jambe.
Blasons est une très courte pièce qui fait guise de préambule à Doesdicon, la pièce de Tânia Carvalho
Doesdicon nous amène dans un conte fantastique. Un personnage est au sol dans un halo vert. Sa danse est son corps, sa danse est sa maladie. Elle tremble de façon compulsive, elle ne peut pas tenir debout seule. Loin de susciter la pitié, elle subjugue par sa posture qui lui donne, dans cette lumière très actrice, une allure d’arlequin fou. Nous sommes dans un rêve où des personnages fantastiques surgissent. Sœur siamoise sortie tout droit de Shining, tourbillons d’automates.
Sur scène, au milieu d’eux et d’
elles, Tânia Carvalho est une guide qui se place à égalité. Malgré quelques longueurs et des tableaux qui s’étirent un peu trop, Doesdicon est un voyage en terre étrange, dans un monde où la norme serait l’univers de Tim Burton.
Merci donc au Festival d’Automne qui par deux fois nous met face à d’autres corps, d’autres gestes. Cela est encore très rare, il faut le souligner.
Au Théâtre de la Ville -Les Abbesses jusqu’au 16 octobre.
Visuel : ©José Caldeira-TMP