Danse
All Over Nymphéas:  Les lignes chics d’ Emmanuel Eggermont à la mémoire de Raimund Hoghe

All Over Nymphéas: Les lignes chics d’ Emmanuel Eggermont à la mémoire de Raimund Hoghe

11 July 2022 | PAR Amelie Blaustein Niddam

Dans la droite ligne d’Aberration, le danseur et chorégraphe poursuit ses réflexions graphiques dans cette pièce pour 5 danseurs et danseuses, où l’âme de Raimund Hoghe plane sur chaque tableau.

Cet amoureux des structures nous accueille dans un espace aux lignes dessinées par des tapis de sol bleutés et des pendrillons de métal. Chez Emmanuel Eggermont, les corps cherchent toujours plus les carrés que les ronds, et cette pièce ne fait pas exception. All over Nymphéas est une succession d’apparitions toutes plus léchées les unes que les autres. Chaque entrée en scène se fait à la façon d’un défilé de mode. Éva Assayas, Mackenzy Bergile, Laura Dufour, Emmanuel Eggermont et Cassandre Muñoz marchent sérieusement, le visage serré, avant de s’installer dans des motifs plus que dans des gestes.

Le travail sur les avant-bras est délicieux. Jusqu’au bout des doigts les lignes se font et se défont. Nous sommes autant dans l’univers de Martin Margiela que dans un manifeste futuriste. L’écriture est super précise, les mouvements, particulièrement ceux d’Emmanuel, ici transmis à d’autres, demandent de la finesse et de la patience. Ils et elles sont tous très différents dans leur rapport au mouvement. On fond littéralement pour les déambulations de Mackenzy Bergile dont les petits pas rapides sur genoux pliés se nichent dans le voguing.

Au fur et à mesure, des couleurs arrivent par touches. Du violet, du vert (qui d’ailleurs aurait su que ces couleurs iraient si bien ensemble ?). Nous assistons à cette quête du “all over”, de la couleur ou du geste qui remplira tout l’espace de la même façon que Monet a peint ses Nymphéas.

Raimund Hoghe a beaucoup écrit pour Emmanuel Eggermont et lui a souvent dansé pour lui. Raimund apparaissait aussi et disparaissait. Il traversait le plateau comme ce quintette, avec assurance. Et comme Emmanuel, il laissait des objets derrière lui :  une trace.

La pièce n’est pas un mémorial, mais elle vient en chaque instant rappeler l’apport du chorégraphe disparu en 2021. L’écriture si précise d’ Eggermont le dépasse, il propose d’aller plus loin que Hoghe en faisant un corps commun entre la scénographie ultra graphique, la musique électronique démente (la rumeur court que la bande son va sortir en vinyl !) de Julien Lepreux et les costumes super pointus de Emmanuel Eggermont, Jihyé Jung et Kite Vollard (ce tailleur violet années 80, cette robe boule vert-d’eau….).

All over Nymphéas est un spectacle… all over ! 100% réussi. Il navigue dans différents espaces, ceux de la mode comme ceux de la pop et du clubbing, dans des fulgurances qui ne nous laissent pas indemnes. Une pièce élégante à la structure millimétrée. Immense coup de cœur.

Jusqu’au 13 juillet à 15h, durée 1H45, dans le Gymnase du Lycée Saint-Joseph.

Visuel : All Over Nymphéas, Emmanuel Eggermont, 2022 © Jihyé Jung

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Amelie Blaustein Niddam
C'est après avoir étudié le management interculturel à Sciences-Po Aix-en-Provence, et obtenu le titre de Docteur en Histoire, qu'Amélie s'est engagée au service du spectacle vivant contemporain d'abord comme chargée de diffusion puis aujourd'hui comme journaliste ( carte de presse 116715) et rédactrice en chef adjointe auprès de Toute La Culture. Son terrain de jeu est centré sur le théâtre, la danse et la performance. [email protected]

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