Pop / Rock
[Live report] Radio Elvis au Théâtre de La Loge

[Live report] Radio Elvis au Théâtre de La Loge

28 October 2014 | PAR Bastien Stisi

Dans le très intime théâtre de la Loge, on fêtait hier soir la release de « Goliath », le nouveau clip de l’ascendant trio Radio Elvis et de son rock poétique sans caillou dans le verbe, auquel il n’est pas compliqué de prédire, hasard du champ lexical et destin glorieux, des lendemains de géant…

Car le projet est âgé seulement d’une toute petite année (avant, le charismatique Pierre Guénard faisait ses armes en ouvrant les concerts de Grand Corps Malade…), et témoigne déjà d’une maturité remarquable. Sur scène, ce chanteur / guitariste et son look d’archétype rock (boucle d’oreille à la Cantat, coupe à la Morrissey tout jeune, Dr Martens aux pieds…) capte le regard, assuré malgré les joues encore pouponnes. Le phrasé est appliqué, instruit, toujours juste, accompagné par deux musiciens en charge du duo basse / batterie. Les artistes voient le public au théâtre de la Loge, et en absence de scène surélevée, demeurent à son niveau. Sans les néons de la scène pour se protéger, certains pourraient être déstabilisés. Ce n’est pas le cas ici. Ce sera parfois même l’inverse, tant la performance proposée, nuancée, parfois habitée, laisse présager quelque chose de grand pour les semaines à venir.

Alors, « Goliath Release Party ». Le nom de la soirée paraît biblique, et le rock proposé plein de révérences aux anciens déifiés par le plus grand nombre. On pense évidemment à Bashung, à Noir Désir, (à Alex Bauer aussi, puisque l’on reprend « Cargo de Nuit »), et globalement à tous ceux qui ont décidé hier que rock et poésie étaient capables de faire chambre commune. Chez Radio Elvis, une fois accepté le fait qu’il n’y ait là aucune trace du King (le nom du groupe est issu d’un cadavre exquis, comme on l’apprenait en interview), on sera également obligé de songer à Antoine de Saint-Exupéry, à Jack London, à Maurice Herzog. Car on cite ces noms-là entre les intervalles comme si l’on devait se donner la légitimité du panthéon culturel. Radio Elvis, comme le Sartre des Mots, assume d’avoir lu avant d’avoir écrit. Et le processus, manifestement, fut merveilleusement efficace.

Le rock poétique et lettré (si le terme paraît pompeux, le son ne l’est pas) de Pierre Guénard est épris de voyage (du corps et de l’esprit), et le revendique. Dans les intervalles de ses morceaux (on raconte l’histoire du capitaine Cook), dans les textes d’un premier EP (Juste Avant La Traversée) constamment empli d’un vagabondage du verbe et des sens (« La Traversée », « Demande à la Poussière »), dans ces mélodies qui s’allongent, changent de chemin en cours en route, s’égarent dans des montées splendides (« Le Continent »), trouvant sa voie au-delà d’un rock qui prend le large du convenu, et brasse dans le même océan pop, variété, et poésie ferréenne. Et si on ose pousser le voyage sur les champs de demain, on ne sera pas surpris d’y retrouver Radio Elvis, sans doute placé aux côtés des autres grands espoirs pop poétique de l’année à venir, Feu ! Chatterton et Grand Blanc en tête de ligne.

Visuel : © Nora Fadlaoui

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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