[Live report] Money et Wild Beasts au Trabendo
Entre la métropole mancunienne et la ville de Kendal, entre l’indie rock impudique et la pop multilingue, entre la performance (écourtée) de Money et celle (allongée) de Wild Beasts, il y avait donc hier soir le complexe musical de La Villette et l’intimité du Trabendo parisien.
Money : bonjour ivresse
Déjà aperçus du côté de la Maroquinerie il y a tout juste un mois aux côtés de leurs voisins de No Ceremony ///, où ils avaient magistralement défendu les compositions de leur premier album Shadow Of Heaven, les quatre Mancuniens de Money paraissent apprécier la capitale autant que les accords indie pop fendeurs de cœurs et de cerveaux torturés.
Et puisqu’il faut bien avouer que le Trabendo est encore bien peu rempli à leur arrivée sur scène dans les alentours de 20 heures, Jamie Lee, le très théâtral chanteur du groupe, prend le parti de donner tout son sens à la notion de « concert intime » en interprétant la plus grande partie de son concert aux côtés du public dans la fosse, la silhouette titubante et visiblement légèrement alcoolisée…La pinte(s) de fin de journée sans aliments dans l’estomac pour la diluer est parfois pour le corps une chose bien difficile à gérer…
Money tape dans la caisse, en ressort avec une poignée de biftons imprimés avec de l’encre de pop déprimée, de rock psyché et d’émanations de sensibilités, livre quelques compositions de son album largement célébré (dont le sublime « Hold Me Forever »), mais offrira une performance qui ne durera finalement, et de manière très surprenante, qu’une toute petite demi-heure. Expéditif et frustrant comme une gorgée de bière trop rapidement enfilée.
Wild Beasts : bonjour justesse
À l’inverse, c’est une performance prolongée et parfaitement habitée que proposeront les garçons de Wild Beasts, vainqueurs haut la main du concours de clair-obscur vocal et musical un peu plus tôt lancé par leurs congénères Mancuniens moins vaillants qu’à l’accoutumée.
Familiarisés avec l’idée de rôles interchangeables au sein du groupe (Hayden Thorpe et Tom Fleming se succèdent avec une réussite équivalente au micro), et poussés par l’enthousiasme d’un public parfois fin connaisseur d’une discographie récemment augmentée par un quatrième album studio (le très synthétique Present Tense), les quatre Britanniques véhiculent dans l’enceinte désormais bien remplie du Trabendo une pop à géométrie variable (et parfaitement valable), qui trace avec la même expertise des segments de new wave synthétique, d’indie pop romantique, d’électro pop scintillante, de pop parfois tribale et cependant toujours bien civilisée.
Les envolées élevées de « A Simple Beautiful Truth », le tournis engendré par les synthés nasillards de « Sweet Spot », les impressionnantes élucubrations vocales de Tom Fleming sur « All The King’s Men », et puis, après un rappel bruyant, l’interprétation du wonderful « Wanderlust », magistral dialogue entre synthés 80’, guitares indie et chants qui portent très haut l’idée de la douce et pénétrante mélancolie.
Dans le public, on trouvera alors une âme bienveillante pour venir offrir au groupe un joli bouquet de fleurs de toutes les couleurs. Hier soir, et après un live exécuté avec force et douceur, beaucoup auraient sans doute aussi voulu offrir une petite partie de leur cœur à ces Beasts sans griffes trop méchamment acérées…
Visuels : © Robert Gil