Cinema
Rencontre avec Marie Enthoven réalisatrice de “Taxistop”, un court métrage qui nous fait rire du “compromis” à la Belge

Rencontre avec Marie Enthoven réalisatrice de “Taxistop”, un court métrage qui nous fait rire du “compromis” à la Belge

08 June 2014 | PAR Yaël Hirsch

Prix coup de cœur au Festival du Court qui en dit long qui s’est terminé Samedi, Taxistop de Marie Enthoven est un film de 21 minutes qui met en scène 5 belges divers dans une voiture commune sensée mener le personnage principal à Genève. Alors que le président du parti nationaliste flamand, Bart De Wever est en charge de la mission toujours délicate de former un gouvernement (la dernière fois, le pays est restée 541 jours sans gouvernement), ce film drôle sensible et plein d’humour est une bonne manière de s’imprégner dans le multiculturalisme à la belge, ses frictions, et son sens débattu du “compromis”. Rencontre avec la réalisatrice énergique, foisonnante et passionnée de ce court-métrage prometteur.

Réalisatrice récompensée de cette comédie vive, courte et incisive, portée par d’excellents comédiens (on avait déjà découvert le talent de Gilles De Schrijver dans Hasta La Vista de Geoffrey Enthoven), Marie Enthoven était à Paris pour le présenter dans le cadre du festival Le court qui en dit long au Centre Wallonie-Bruxelles.

Philosophe de formation, elle dit avoir été toute sa vie obsédée par l’écriture. Depuis l’âge de douze ans, elle écrit en relâche, et est passée du journal intime au scénario en travaillant avec le réalisateur Alexis Van Stratum : “Ecrire, ce n’est pas le problème pour moi, j’écris tout le temps, je n’ai pas l’angoisse de la page blanche. Une fois le film fait, c’est le partager avec le grand public qui me donne le trac”.

Elle aime travailler à deux et les garde-fous que cela permet de placer, mais a encore plus envie d’aller jusqu’au bout de ses idées. C’est comme ça qu’elle passe à la réalisation avec un premier cour-métrage, Naïve (2013) et ce “taxistop” déjà sélectionné et primé par plusieurs festivals, à Bruxelles, Cannes, Paris et Montréal.

L’histoire? C’est son mari qui lui a inspirée avec une anecdote. Conseiller en communication, Antoine a pour maxime de vie et gagne-pain l’idée force du “compromis”. C’est pour exposer ces théories qu’il doit se rendre à Genève. Mais une grève l’empêche de prendre le train, sans voiture et avec une ex-femme mégère et castratrice qui va dans cette direction mais refuse de l’emmener, il décide de faire du “Taxistop” (du covoiturage) avec 4 personnages hauts en couleur : il y a Patsi la conductrice wallonne – hippie assez irresponsable, Bart & Alexia, le couple de gentils flamands qui n’en pensent pas moins et Gaétan, le pubeux bruxellois assez pédant. Le road-trip commence et avec lui une farce où l’on découvre quelles sont les limites du compromis.

Il y a bien sûr en sous-texte des références à l’identité complexe de la Belgique. Une identité que Marie Enthoven connaît bien puisqu’elle est d’Anvers et parfaitement bilingue Néerlandais / Français. Parlant de son grand-père, elle explique que les flamands ont subi des discriminations pendant des décennies, n’ayant même pas le droit de se défendre dans leurs langues devant les tribunaux et les administrations tenues par les bourgeois francophones. Pendant des années, ils n’ont rien dit, puis, comme le jeune couple flamand du film, il  est en train de se barrer.

Mais point n’est besoin de voir toute cette politique dans le film, c’est un plus, c’est sûr, mais Taxistop permet avant-tout de mettre en place une comédie où le public rit franchement. Il rit avec les personnages de leur situation compliquée. D’ailleurs la réalisatrice trouve très judicieux que le festival Le court qui en dit long ait montré son film avec d’autres courts sous la thématqiue “Vivre ensemble”.

Quant au rythme, Marie Enthoven le veut toujours enlevé pour ses films. Avec elle pas question de traîner en longueur ou s’ennuyer : il a fallu seulement 8 jours de tournage, détourner une bretelle d’autoroute et pas plus de 3 prises par image. La structure du scénario progresse vivement en jouant sur les interactions entre les personnages et les images, dialogues, ainsi que la musique ont été montés pour que le film transmette énergie et action. Un oeuvre pétillante et une réalisatrice à suivre.

visuel : photo officielle du film

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Yaël Hirsch
Co-responsable de la rédaction, Yaël est journaliste (carte de presse n° 116976), docteure en sciences-politiques, chargée de cours à Sciences-Po Paris dont elle est diplômée et titulaire d’un DEA en littérature comparée à la Sorbonne. Elle écrit dans toutes les rubriques, avec un fort accent sur les livres et les expositions. Contact : [email protected]

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