Le paysage s’expose à Chaumont-sur-Loire
Pour sa troisième édition, l’exposition de photographie contemporaine du Domaine de Chaumont-sur-Loire voyage entre paysages lointains et bords de Loire. Une parenthèse hors du tumulte pour admirer six visions de la nature.
Chaumont-photo-sur-Loire rassemble six photographes travaillant sur le paysage et la nature qui proposent ici des images inédites en France. Si trois d’entre eux se sont concentrés sur la Loire, les trois autres nous parlent d’horizons lointains.
Avec ses portraits de fleurs, Juan San Juan Rebollar nous emmène dans son jardin au Mexique. Il attend patiemment que ces fleurs qu’il fait pousser chez lui sèchent et se décomposent pour les capturer sur fond noir. Le portrait se transforme alors en paysage, les fleurs en formes animales, les nervures en rivières, les pétales en collines. Des univers miniatures se créent et transportent notre imagination.
La deuxième étape internationale de l’exposition nous amène au nord du Soudan avec Juliette Agnel. Le Domaine de Chaumont lui a demandé de travailler sur les pyramides oubliées des pharaons noirs, et de ce pays politiquement instable, elle est revenue avec deux séries d’images. Toutes les deux racontent les vestiges anciens et un temps plus large que d’habitude. Les pyramides très pentues de Méroé et les tombes islamiques en forme d’ogive se dressent entre les dunes du désert et un ciel nocturne rempli d’étoiles. Les images, résultats d’un photomontage précis, laissent une impression d’étrangeté, comme si on contemplait un monde imaginaire vaste et mystérieux. Sa seconde série retranscrit les vestiges en noir et blanc et parfois en négatif pour nous ramener à l’époque actuelle.
Pour compléter notre tour du monde photographique, le coréen Bae Bien-U nous fait découvrir les collines de Jeju, une île volcanique au sud de la Corée du Sud. Proches de l’abstraction, ses paysages très contrastés ondoient, balayés par le vent. Le noir et blanc des clichés évoque les paysages chinois à l’encre, et le rapport des masses tantôt en faveur du blanc, tantôt en faveur du noir, cherche une tension entre la terre et le ciel, la matière et l’infini.
Jeffrey Blondes, Manolo Chrétien et Henry Roy ont tous les trois travaillé sur les paysages de la Loire. Ils nous invitent à ralentir le rythme en nous attachant aux changements subtils du paysage, aux détails qui marquent le passage du temps.
Henry Roy trace un portrait du Domaine de Chaumont, où il est venu lors d’une résidence intermittente lui permettant d’explorer les saisons et leurs lumières. Ses origines haïtiennes lui font aborder le lieu de façon animiste, par la nature et la lumière, pour une mosaïque de détails, de fragments et d’ombres. Le résultat final allie texte et photographie et raconte le Domaine de façon indirecte, par le biais du ressenti du photographe.
Jeffrey Blondes et Manolo Chrétien se sont eux concentrés sur le fleuve. Quand Jeffrey Blondes nous offre une vidéo panoramique et poétique projetée sur plusieurs mètres, Manolo Chrétien resserre ses cadrages sur l’eau. Le temps est lent mais le paysage évolue subrepticement. L’un se concentre sur l’infinité de couleurs du paysage, l’autre sur le mouvement et la matière. L’influence des impressionnistes est palpable, tant dans les matins roses et brumeux de Jeffrey Blondes que dans l’eau bouillonnante de Manolo Chrétien.
Chaumont-photo-sur-Loire s’accorde parfaitement à la saison. Les photographies parlent d’un rythme ralenti, d’une nature qui entre dans la partie sommeil de son cycle, de monuments hors du temps qui en deviennent mystiques. Mais comme au Domaine de Chaumont-sur-Loire, sous l’engourdissement du hors-saison, la nature suit son cours, et elle mérite le détour.
Chaumont-photo-sur -Loire
Du 16 novembre 2019 au 28 février 2020
Domaine de Chaumont-sur -Loire
Visuels : 1-© J. Agnel / 2- ©J.S.J Rebollar / 3-© J. Blondes / 4- ©B. Bien-U / 5-© H.Roy / 6- ©M. Chrétien