A l'affiche
[Critique] « Boyhood » : une magnifique fresque sur l’enfance et l’adolescence

[Critique] « Boyhood » : une magnifique fresque sur l’enfance et l’adolescence

16 July 2014 | PAR Hugo Saadi

Richard Linklater avait déjà intégré la notion du temps qui passe dans ses films de la trilogie « Before » (Sunrise, Sunset, Midnight) où il étalait son récit sur 20 ans en suivant un couple (Julie Delpy & Ethan Hawke). Avec Boyhood il marque considérablement le cinéma de son empreinte en proposant une expérience unique, monter un film avec 12 ans de tournage derrière et des acteurs qui évoluent et grandissent sous nos yeux. Un condensé d’émotion qui nous fait retomber en enfance.

[rating=5]

On avait déjà pu connaître cet effet en vieillissant avec les personnages notamment dans les séries à rallonge ou les sagas comme Harry Potter. Sauf qu’avec Boyhood, R. Linklater centre son récit sur l’enfance puis l’adolescence de Mason (Ellar Coltrane), sa sœur ainée (Lorelei Linklater, la propre fille du réalisateur) et ses parents interprétés par Patricia Arquette et Ethan Hawke. L’américain a réussi à convaincre les acteurs de signer un contrat de 12 ans sans savoir précisément de quoi il allait en retourner. Chaque année, une semaine était consacrée au tournage du film dont ils découvriront les images une fois seulement Boyhood terminé. Une prise de risque qui a été récompensée par l’Ours d’Argent du meilleur réalisateur au dernier festival de Berlin.

Avec ses 12 années en perspective, le réalisateur américain a de la matière pour explorer l’enfance, les relations de couple, le passage à l’âge adulte, les premiers émois amoureux et bien entendu les soubresauts de la vie de famille. Un divorce, un remariage, un nouveau bébé, une belle-famille, un déménagement, il ne laisse rien au hasard et peut alors dresser un portrait de famille complet où les pièces rapportées ont aussi leur importance. Le spectateur devient lui aussi un membre de la famille, il est au cœur des longues discussions lors des repas de famille, des engueulades, de toutes les scènes quotidiennes et des multiples étapes de la vie. Il confirme après sa trilogie, son talent pour l’écriture et nous offre des scènes mémorables en terme d’émotion mêlant le drame au ton humoristique.

Les transitions du film se font sans que l’on s’en aperçoive, ce sera une nouvelle coupe de cheveux, une barbe naissante, une voix qui mue ou encore un nouveau style vestimentaire qui nous fera prendre conscience que le récit a avancé de plusieurs années et non le fondu noir. D’autres éléments comme la Game Boy disparaissant, l’arrivée de l’Iphone ou encore la guerre en Irak et la candidature de Barack Obama permettront également une identification intelligente du temps écoulé. C’est bien évidemment cette fluidité du montage et l’utilisation à bon escient des ellipses qui rendront le métrage passionnant de bout en bout et qui n’ennuiera pas une seule seconde malgré sa durée de 2h45. La direction d’acteurs de Linklater est parfaite, lui qui avait dirigé les premiers pas de Matthew McConaughey au cinéma dans Génération Rebelle a su relever le défi du tournage étalé sur douze années. Boyhood pourrait se résumer en la performance tout en justesse d’Ellar Coltrane qui est LA vedette. Patricia Arquette, en mère accablée est surprenante, quant à Lorelei Linklater et Ethan Hawke, ils viennent compléter le très bon quatuor.

Enfin, Boyhood permettra au plus grand nombre de se retrouver dans ce jeune garçon qui se passionne pour les aventures de l’apprenti sorcier Harry Potter, qui traîne sur Facebook, qui critique la saga Twilight ou encore qui découvre le corps des femmes dans les catalogues de lingerie. Sans oublier que le film dispose d’une bande originale de très haute qualité reprenant les hits de ces dernières années, Arcade Fire, Coldplay, Vampire Weekend, Gotye, Phoenix ou bien The Black Keys, mais également plus ancien avec Bob Dylan ou Paul Mc Cartney.

Boyhood, un film de Richard Linklater, avec Ellar Coltrane, Ethan Hawke, Patricia Arquette, Lorelei Linklater, drame américain, 2h43. Sortie le 23 juillet 2014.

visuels (c) Diaphana

[Festival d’Avignon] La belle vitalité des Sorelle Macaluso
[Critique] « Jeux interdits » de René Clément en version restaurée : un film inoubliable
Avatar photo
Hugo Saadi

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration