Opéra
Nos cœurs s’ouvrent à la voix d’Anita Rachvelishvili

Nos cœurs s’ouvrent à la voix d’Anita Rachvelishvili

31 January 2023 | PAR Nicolas Chaplain

À Berlin, la mezzo-soprano Anita Rachvelishvili est Dalila, superbe et envoûtante dans Samson et Dalila de Camille Saint-Saëns dirigé par Thomas Guggeis et mis en scène par le réalisateur et scénariste argentin Damián Szifron dont Les Nouveaux Sauvages a été présenté au Festival de Cannes en 2014 et est nommé aux Oscars.

La mise en scène de Damián Szifron est pittoresque au sens étymologique (soit digne d’être peint). Les décors sont des tableaux réalistes qui représentent le désert sous une nuit étoilée, une grotte en pierre et le temple des philistins. Un soin particulier a été apporté aux couleurs, aux lumières et à un certain exotisme (casques, épées des Philistins, tuniques chatoyantes, un char porté par des soldats virils, des danseuses nues autour d’un bassin, le taureau mort tiré par Samson) qui rappelle des scènes et des figures peintes par Delacroix, Ingres, Antoine-Jean Gros ou Jean-Baptiste-Ange Tissier. C’est aussi au charme désuet des films spectaculaires de la Paramount, aux péplums réalisés par Cecil B. DeMille que semble rendre hommage cette production qui ne manque ni d’attraits ni d’intensité. Le corps d’une jeune femme juive est porté et suivi en procession par un chœur éploré. Lors de la vibrante Bacchanale, on assiste à des danses endiablées et à une série d’égorgements.  

Anita Rachvelishvili ensorcelle l’auditoire avec sa voix incandescente et sombre, son tempérament orageux et son jeu naturel tout comme elle séduit Samson sans minauderie, avec autorité, des graves profonds, des aigus brillants et des nuances éblouissantes. Le vigoureux ténor Brian Jagde est un Samson ardent et très crédible, impressionnant de puissance et de chaleur. Le metteur en scène explore la relation d’amour-haine entre Samson et Dalila et imagine ce qu’aurait pu être leur histoire si elle avait été heureuse. Deux danseurs doublent les protagonistes et jouent leur rencontre, leur vie avec deux jeunes enfants. Mais finalement, ils se retrouvent face à face, troublés, tiraillés, se regardent avec ambiguïté.

Thomas Guggeis dirige intensément la Staatskappelle. Il exhale la sensualité, l’opulence et les couleurs riches de la partition influencée par Liszt, Berlioz et Wagner, exacerbe une douceur tantôt suave tantôt douloureuse, survolte la brutalité de certains passages et produit ainsi un sentiment de volupté.

Photo : © Matthias Baus

Piste noire, une série policière à skis
Le festival Parallèle à Marseille entre folklore et récits de création
Nicolas Chaplain

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration