Opéra
Coronis, redécouverte baroque à Limoges

Coronis, redécouverte baroque à Limoges

13 February 2020 | PAR Gilles Charlassier

Dans le cadre de la tournée de la résurrection de Coronis de Durón, l’Opéra de Limoges, où on été réalisés décors et costumes, présente deux représentations de cette zarzuela baroque.

[rating=4]

Si le Théâtre de Caen a eu en novembre dernier la primeur de la résurrection de Coronis, zarzuela baroque de Sebastián Durón, ce sont les ateliers de l’Opéra de Limoges – un des six coproducteurs du spectacle – qui, avec la maison normande, ont réalisés les décors conçus par Amélie Kiritzé-Topor, et les costumes dessinés par Bruno Fatalot. Sous les lumières oniriques réglées par Mathias Roche, la mise en scène économe mais non avare de fantastique pyrotechnique d’Omar Porras, restitue, sans surcharge, le merveilleux mythologique d’un livret qui mélange les registres avec une indéniable jubilation, de la pastorale sentimentale à la comédie. L’habileté du dispositif visuel unique, à la virtuosité carnavalesque, tire parti de faux effets de carton-pâte pour instiller une ironie gourmande, tant dans les tonalités marines du royaume de Neptune que dans les dorures du finale triomphant, sous la houlette d’Apollon. Le jeu d’acteurs n’est pas laissé pour compte : si les solistes donnent un relief rhétorique et comique à leurs incarnations, acrobates et danseurs investissent régulièrement le plateau, enrichissant la fluidité virtuose du spectacle. A la fois divertissement et exploration les ressources poétiques et philosophiques de l’ouvrage, le travail du metteur en scène colombien conjugue vitalité théâtrale et sensibilité musicale.

Défendue par Vincent Dumestre, et son ensemble Le Poème Harmonique, la partition déploie au fil des deux « journées » – l’équivalent d’un acte dans la zarzuela – une inspiration assez napolitaine dans un kaléidoscope de petites scènes savoureuses et contrastées, accompagné par une direction aussi attentive aux effets qu’à la qualité d’une narration riche en péripéties. Dans le rôle-titre, Ana Quintans fait résonner une Coronis à l’expressivité galbée dans une voix homogène, nuancée de moires et d’affects versatiles au gré des situations. Isabelle Druet affirme un Triton haut-en-couleurs et en réparties. Le Protée d’Emiliano Gonzalez-Toro ne lui cède en rien, équilibrant impact vocal et intelligence des mots. Anthéa Pichanik et Victoire Brunel forment une irrésistible paire en Ménandre et Sirène. La clarté lumineuse de Marielou Jacquard en Apollon se révèle complémentaire du Neptune campé par Caroline Meng. Mentionnons encore les interventions de Brenda Poupard, en Iris, et celles du Rosario d’Olivier Fichet. A l’évidence, la distribution vocale sait façonner des portraits vivants, sans jamais sacrifier la cohérence et le plaisir collectif, que le public saura applaudir au terme d’une heure cinquante sans entracte et sans ennui. La preuve que la curiosité ne saurait se limiter aux rayons des bibliothèques, et doit investir les scènes lyriques. Ainsi éveillé, le goût pour la zarzuela baroque ne doit plus se tarir.

Gilles Charlassier

Coronis, Durón, mise en scène : Omar Porras, Opéra de Limoges, février 2020

©Steve Barek – Opéra de Limoges

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Gilles Charlassier

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