Danse
Family Machine : ma famille et moi

Family Machine : ma famille et moi

23 November 2019 | PAR Sarah Reiffers

La Compagnie Toujours après minuit, fondée par les metteuses en scène, chorégraphes, danseuses et actrices Brigitte Seth et Roser Montlló Guberna, a présenté jeudi 21 novembre à Angers sa nouvelle création, Family Machine, basée sur un roman de Gertrude Stein. Puisant sa force dans un texte génial, Family Machine propose une réflexion plaisante sur l’identité et la négociation entre le moi et l’autre.

Gertrude Stein (1874-1946) fut romancière, poétesse, collectionneuse d’art, dramaturge et divisa les foules, certains criant au génie, d’autres à l’imposture (sa combine, écrit par exemple Virginia Woolf dans une lettre datée du 24 août 1925, consiste à répéter le même mot cent fois jusqu’à ce qu’enfin on en ressente la force). La Compagnie Toujours après minuit s’empare de l’un de ses textes, The Making of Americans, pour livrer une réflexion sur la famille et l’identité, l’autre et le moi, au croisement du théâtre et de la danse (mais plus proche du théâtre que de la danse, contrairement à ce qui nous est indiqué). 

Fidèle au style de Gertrude Stein, Family Machine repose, que ce soit pour le fond ou la forme, sur la répétition. La structure du spectacle enchaîne les vignettes, la musique répète inlassablement les mêmes notes, la danse les mêmes mouvements. La famille qu’on nous présente erre sur la scène en suivant encore et encore la même trajectoire en zigzag. Elle est comme une volée d’oiseaux dont le meneur change régulièrement pour économiser ses forces, un aimant qui attire irrésistiblement les trajectoires personnelles. On l’aime et on la déteste à la fois, murmure le texte ; elle nous définit, en tant que membre d’un groupe, en même temps qu’elle nous empêche de nous définir, en tant qu’individu à part entière.

Le format oral fait des merveilles avec le texte, d’autant plus que les acteurs et actrices savent en restituer toute l’ironie mordante. Les lumières sont somptueuses et la mise en scène, des plus sobres, laisse la place aux corps et au mouvement (amplifié et prolongé par la poussière qui s’élève de la couche de terre recouvrant le plateau). Family Machine charme par sa bienveillance et l’intelligence du message qu’il veut confier, plutôt que par sa mise en scène ou sa chorégraphie ; on en ressort avec un charmant désir d’autopsier nos propres rapports familiaux.    

Family Machine. Du 22 au 25 janvier 2020 à Chaillot Théâtre national de la Danse, le 27 février 2020 à la Scène nationale d’Orléans et du 31 mars au 3 avril 2020 au Théâtre de la Croix Rousse à Lyon.

Visuel : Christophe Raynaud de Lage

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Sarah Reiffers

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