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[Live report] Mashrou’Leila et Acid Arab à la Gaîté Lyrique

[Live report] Mashrou’Leila et Acid Arab à la Gaîté Lyrique

11 October 2014 | PAR Elie Petit

Acid Arab mixait hier à la Gaîté Lyrique. Mais le duo électro qui monte et son clavieriste aux ritournelles infernales se sont fait voler la vedette par un groupe venu de Beyrouth : Mashrou’Leila ! Après l’Arabic Sound System à l’Institut du Monde Arabe, on vous raconte une autre grande soirée autour des nouvelles icônes de la musique arabe.


Quand on va à la Gaîté Lyrique, dans le cadre du Festival d’Ile-de-France, on est sûr d’être conquis. Dans cette soirée en forme de triptyque, débutant par un set du respecté DJ Maurice Louca, du Caire, on était venu pour Acid Arab, dont le nom est rentré l’esprit des amateurs de musique électronique ces derniers temps. Le duo de chez Moune grimpe à une vitesse effrenée et clôt une série de dates françaises et européennes dont l’écho a été plus que retentissant.

Mais c’est Mashrou’Leila qui a véritablement déchaîné les passions. Groupe libanais formé en 2008, il a offert une prestation dense et intense portée par un public de fans surprenants. Les applaudissements sont nourris lors de leur arrivée sur scène, les cris pleuvent. A la surprise de beaucoup, un tiers du public connaît ce groupe inconnu, qui était notamment de passage pour une rencontre à Sciences Po cette semaine.

Le groupe enchaîne les styles, dans un arabe qui ressemble parfois à de l’anglais. Sans comprendre les paroles mais dans le ton, on remarque aisément que les mots sont satiriques et provocateurs, voire dans la contestation. Dehors des jeunes gens discutent politique, liberté, jeunesse, en arabe.

Leur énergie est vive devant le public composé de nombreux jeunes Libanais et de beaucoup de Marocains. Et de très nombreuses groupies. La voix du chanteur vole, les longues chevelures bouclées de lionnes magnifiques, présentes plus qu’à l’accoutumée, tanguent au gré des solos de violon qui joue au centre de la scène pour plus profondément encore habiter leur art par l’arabité des mélodies.

Soudain, une spectatrice monte sur scène et danse. Un vigile tente de l’en sortir mais elle se faufile entre les membres du groupe amusés et surpris. Plus tard un autre jeune homme montera sur scène et entamera une danse enflammée. Le public adore, rend hommage par sa joie à l’engagement de ce groupe, symbole d’une jeunesse du Moyen-Orient qui chante les hymnes de sa liberté, de son émancipation, avec une grande joie. Leur manière de s’investir, de faire de la politique, avec plaisir et cohésion.Le chanteur prend à plusieurs reprises un mégaphone pour finir ses chansons. Et le public est captif de ses sauts droits et de longs râles qu’il enchaîne sur les pizzicati du violon. La musique est pressée et concentrée.

Après quelques échanges de youyous, de cris et d’applaudissements, le groupe se dit content et fier, touché par la générosité du public, en effet inouïe. Il y a quelque chose de très étrange et touchant à voir danser et communier cette salle schizophrène : entre un public qui ne fait plus qu’un avec le groupe phare de sa génération, qui comprend dans le vécu de sa jeunesse le sens des paroles et autre public, qui est doublement spectateur : du spectacle et des spectateurs.

Une photo collective, un enregistrement en complicité avec le public et Mashrou’Leila quitte la scène se mêlant à la foule du hall de la Gaîté Lyrique pour signer des autographes pendant plus d’une heure.

A l’heure dite, les beats entêtants d’Acid Arab retentissent dans le même hall. Les deux DJs dansent derrière les platines et lancent de temps en temps un claviériste oriental qui passe, sur son synthé, du nay aux violons orientaux, à la trompette, et au oud. L’homme, casquette et lunettes vissées, est redoutable de précision.

La salle devient dancefloor, les hanches se déhanchent et les bras forment des arabesques. Les phases s’enchaînent à une vitesse folle et on voit Guido Minisky et Hervé Carvalho compter les temps et s’avertir avant de lancer des basses toujours plus puissantes. Au centre, des clubbeurs, sur les côtés, des apprentis derviches tourneurs. Et entre eux, un invité surprise : Rachid Taha ! Le set dur un peu plus d’une heure et tout est permis, Guido s’allume une clope. Et le clavieriste ne s’arrête plus de prolonger cette très belle soirée de découvertes et de confirmation. Longue vie et longues nuits à la nouvelle scène de la musique arabe !

Le festival d’Île-de-France, de son côté, se clôture ce samedi avec sa soirée Back To Punk à la Cigale et le concert des Français de Cheveu en tête d’affiche.

Visuel : (c) Idir Benard

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Elie Petit
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