Musique
Live Report’: Beethoven dans toute sa splendeur à Pleyel

Live Report’: Beethoven dans toute sa splendeur à Pleyel

18 January 2013 | PAR Marie Charlotte Mallard

Mercredi et jeudi soir, le chef suédois Herbert Blomstedt dirigeait l’Orchestre de Paris qui, pour ces soirées, consacrait sa programmation à Beethoven et recevait à cette occasion le pianiste Lars Vogt pour le Concerto pour piano n°1 en Ut majeur. La deuxième partie du concert donnait à entendre la Symphonie n°3 de Beethoven.

 

© Gert Mothes

Beethoven est décidément en vogue cette année, indubitablement indémodable et incontestablement incontournable dans la programmation des orchestres autant que dans le répertoire d’un chef d’orchestre. Après l’ONF qui consacrait en novembre dernier un cycle à ses symphonies, l’Orchestre de Paris lui consacrait un concert.  Herbert Blamstedt arrive sur scène avec beaucoup d’entrain, tout sourire, pétillant du haut de ses 86 ans, manifestement heureux de retrouver l’orchestre avec qui il a fait ses débuts. En préambule du Concerto pour piano et de la symphonie, était également donnée l’ouverture de Léonore II. Avec cette oeuvre, le chef affirme une direction souple et précise, permettant ainsi de faire ressortir au mieux les différents contrastes de l’œuvre. En accentuant fortement les points d’arrêts, secs, forts, il laisse retentir les notes et peser les silences qui suivent, comme pour marquer le jeu théâtral qui caractérise cette ouverture, sorte de résumé d’opéra. Cela se vérifiera d’autant plus lorsque vient le fameux appel en coulisse de la trompette qui résonne par deux fois avant la coda finale. Blamstedt laisse largement sonner l’instrument, résonner le silence, avant de lancer l’assaut final et triomphal. Une introduction qui mettait donc l’eau à la bouche et laissait présager  un concert délectable.

 

© Felix Brœde

Lars Vogt arrive ensuite sur scène, humblement, dignement mais néanmoins sobrement, presque timidement. Dès l’introduction l’on sent l’orchestre délicat et précautionneux, gracieux et élégant sans pour autant atténuer le caractère purement Beethovenien de l’œuvre. Entre ballade joyeuse et marche virile, l’orchestre attentif oscille avec légèreté et facilité entre les deux caractères, porté par l’élan que donne le maestro. Lars Vogt, affiche dès son entrée un jeu virtuose empreint d’une touchante candeur enfantine. L’écriture de Beethoven est pour le piano à la fois démonstrative et brillante, et, sous la main de Lars les lignes ornementales coulent, glissent naturellement. Ainsi, le piano arbore un timbre cristallin qui charme par sa sensibilité que l’on pourrait quasiment qualifier de féminine. Le jeu théâtral caractérise particulièrement cette œuvre. Tout au long de l’exécution du concerto, cette théâtralité ressortira largement, appuyée par la connivence chaleureuse et assurée entre l’orchestre et le soliste. Ainsi, du premier mouvement ressort la roublardise des jeux d’enfants, une innocence à la fois féminine et enfantine qui sera d’autant plus mise en lumière dans le second mouvement, par la vocalité gracieuse, légère, aérienne et méditative que Lars Vogt exalte. Néanmoins, si le mouvement apparaît agréablement doucereux, on aurait aimé voir l’interprète aller plus loin encore dans les nuances piano  et ainsi entendre d’autant plus de sensibilité. Dans le final, un rondo vigoureux et  ludique, l’artiste et l’orchestre s’amusent et jouent ensemble dans tous les sens du terme. Le mouvement, particulièrement gai presque comique fait encore une fois ressortir une sorte de puérilité naïve et insouciante. Au sortir de l’exécution l’artiste fut énormément applaudi, rappelé 5 fois, il donnera deux bis (la touchante valse n°15 op39 pour piano de Brahms, l’émouvante et poignante Nocturne n°2 op 9 de Chopin), desquels ressortiront particulièrement la sensibilité à fleur de peau de l’artiste que l’on avait jusqu’alors qu’entre-aperçu .

Après l’entracte, place à la 3ème symphonie de Beethoven, « l’Héroïque ». Sous la baguette du maestro suédois les deux premiers accords sont secs, marqués, retentissants, comme dans Léonord II, il laisse le silence même bref entre les deux accords peser de tout son poids. De manière générale, dans l’ensemble de la symphonie il adoptera des tempi soutenus et énergiques, y compris dans la marche funèbre du second mouvement. Très habité, il se promène dans l’œuvre de Beethoven, variant légèrement le tempo au sein même des mouvements et met en évidence la nature clair-obscur de la symphonie. Si l’interprétation de Danièle Gatti et de l’ONF avait séduit et nous avait emportés (malgré les imperfections de certains pupitres), celle de l’orchestre de Paris et de Blomstedt apparût ce soir bien au-dessus et d’autant plus en adéquation avec le caractère propre aux œuvres de Beethoven. La vivacité, la splendeur, les explosions retentissantes et éclatantes des premiers, troisièmes, et quatrièmes mouvements furent largement magnifiées, le drame lyrique du second mouvement sublimé. Un reproche tout de même, des cordes parfois trop présentes, ne laissant pas assez entendre le chant des bois et notamment du hautbois dans le second mouvement. L’interprétation fut largement saluée par le public de Pleyel qui ne cessa de vouloir voir revenir le chef sur scène . Celui-ci fut particulièrement reconnaissant du public mais surtout de ses instrumentistes, en effet, il n’hésita pas à rentrer en plein cœur de l’orchestre pour faire lever un à un chaque pupitre et particulièrement les solistes, les félicitant et leur rendant hommage personnellement. Une proximité, et la joie d’un moment musical intense pleinement partagé qui faisait plaisir à voir.

visuel à l’affiche: www.orchestredeparis.com

Roman Electric Band (When the high goes down)
Festival Premiers plans : une ovation à Blanche-Neige en ouverture (18/01/2013)
Avatar photo
Marie Charlotte Mallard
Titulaire d’un Master II de Littérature Française à la Sorbonne (Paris IV), d’un Prix de Perfectionnement de Hautbois et d’une Médaille d’Or de Musique de Chambre au Conservatoire à Rayonnement Régional de Cergy-Pontoise, Marie-Charlotte Mallard s’exerce pendant deux ans au micro d’IDFM Radio avant de rejoindre la rédaction de Toute la Culture en Janvier 2012. Forte de ses compétences littéraires et de son oreille de musicienne elle écrit principalement en musique classique et littérature. Néanmoins, ses goûts musicaux l’amènent également à écrire sur le rock et la variété.

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration