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Le Quatuor Ysaÿe, c’est fini !

Le Quatuor Ysaÿe, c’est fini !

27 January 2014 | PAR La Rédaction

Clap de fin pour le Quatuor Ysaÿe, qui donnait vendredi 24 janvier son tout dernier concert, dans le cadre de la 6e Biennale de Quatuors à cordes à la Cité de la Musique.

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1984-2014 : trente ans de vie musicale au compteur pour l’un des plus célèbres et influents quatuors français, les Ysaÿe. Composée de Guillaume Sutre (violon), Luc-Marie Aguera (violon), Yovan Markovitch (violoncelle) et Miguel da Silva (alto), la formation a vu aller et venir quelques-uns des meilleurs musiciens français au cours de ces trente années, dont les violoncellistes Marc Coppey et François Salque. Seul Miguel da Silva, fondateur historique, a vu naître cette « micro-société, avec ses grandeurs d’âme et ses bassesses », comme il le raconte au journal Le Monde. Pour cette séparation à l’amiable, les membres du Quatuor Ysaÿe ont voulu un concert en forme de fête. Les trois heures de programme prévues parcourent à la fois l’histoire de la musique de chambre et une aventure humaine tissée à quatre archets.

Le Quatuor en sol mineur de Debussy, d’abord, clin d’œil au tout premier Quatuor Ysaÿe, celui mené par le célèbre violoniste du même nom, qui créa l’œuvre en 1893. Puis le Quatuor n°16 op.135 de Beethoven, fameux pour le titre de son dernier mouvement, « La décision difficilement prise », et les mystérieuses inscriptions que porte le manuscrit de la partition (« Muss es sein ? Es muss sein ! »/ « Le faut-il ? Oui, il le faut ! »). A les écouter jouer ensemble, on se prend nous aussi à se demander : se séparer, le faut-il ? La complicité et les années passées à se fondre dans le son les uns des autres donnent aux mouvements lents une délicate intensité. C’est à peine si l’on entend son voisin respirer.

Pour le Quintette à cordes en ut majeur de Mozart, les quatre hommes sont rejoints par l’altiste Isabel Charisius. Dans le public, on s’évente pour chasser la chaleur, on se passe les bouteilles d’eau… Le marathon se joue de concert entre la scène et la salle ! Là encore, brillant échantillon d’une carrière qui s’est fait une spécialité des enregistrements d’intégrales : Mozart donc, mais aussi Beethoven, Haydn, Mendelssohn, Schumann… De quoi laisser sans voix !

C’est avec Fauré et son Premier Quintette avec piano que le concert se poursuit. Avec le pianiste Jean-Claude Pennetier, voilà l’occasion de revenir à une musique française qui leur va comme un gant. Là encore, le dédicataire en est le violoniste Eugène Ysaÿe. Au fur et à mesure du concert, on boucle les boucles, on referme les arabesques, le tout sous les yeux d’un public qui, du haut des balcons et galeries, s’alanguit doucement, les bras ballants dans le vide. Félix Vallotton et ses scènes d’intérieur à la douceur inquiétante ne sont pas loin.

La soirée s’achève avec La Nuit transfigurée de Schönberg, sextuor à fleur de peau inspiré d’un poème de Richard Dehmel qui ne l’est pas moins. Il y est question de deux amants, marchant ensemble dans une forêt. La femme avoue à l’homme qu’elle porte l’enfant d’un autre. De l’ombre à la lumière, toute la partition ne fait qu’avancer vers un apaisant pardon final. Pour dire que même des « bassesses », la musique triomphe toujours ? A entendre les musiciens redoubler d’expressivité et de subtiles couleurs, on a envie de répondre oui.

A presque minuit, il n’est toutefois pas question de laisser filer les quatre comme ça. Les jeunes membres des Quatuors Girard et Voce, avec d’autres musiciens, se joignent sur scène, à la surprise générale, pour une ultime Offrande musicale. Histoire de montrer qu’on a bien reçu le flambeau !

Victorine de Oliveira

Quatuor Ysaÿe © Gérard Rondeau

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