Roman : Esther David, Le livre de Rachel
Après « La ville entre ses murs » (1998), l’artiste et auteure indienne Esther David publie « Le livre de Rachel » aux éditions Héloïse d’Ormesson. A grands renforts de recettes traditionnelles, Rachel tente de sauver la synagogue désormais vide de son village de Danda, près de Bombay. Un combat aussi noble que vivant.
Alors que ses enfants sont partis vivre en Israël, Rachel n’a pas pu se résoudre à quitter le village de Danda où elle a été si heureuse avec son mari Aaron entre la mer, les tamariniers, sa cuisine et la vieille synagogue. Veuve d’âge honorable, mais toujours aussi alerte et fine cuisinière, Rachel a désormais les clés de la synagogue et l’entretien. Celle-ci est toujours vide puisqu’il n’y a plus dix hommes juifs dans le village pour constituer « minian », le petit groupe nécessaire pour prier. Mais le jour où un homme d’affaire veut racheter le terrain de la synagogue pour créer une station balnéaire, Rachel panique et parvient à réunir autour de ses bons petits plats un jeune avocat pour la défendre et l’une de ses filles. Le combat semble perdu d’avance, mais heureusement, le prophète Elie veille.
Restée à mi-chemin entre tradition et modernité, Rachel est une vestale indienne et juive touchante. Femme forte mais restant le plus souvent à la cuisine, encore habitée par un vieil esprit de marieuse, même si elle accepte les shorts en jean de sa fille, elle ouvre au lecteur tout un monde lointain. Celui des “Bné-Israël”, ces rares juifs indiens en voie de disparition ( La plupart des juifs indiens ont à l’heure actuelle émigré en Israël). Sa manière de nous faire découvrir cette tradition est très instinctive et sensuelle. Cela passe par les odeurs, les sentiments filiaux, la mémoire évidemment, et le plaisir évident que Rachel prend à suivre et perpétrer des rites, même seule.
Le roman peut aussi se poser sur l’étagère de la cuisine, comme livre de recettes à la fois “cachères” et indiennes… Ainsi l’on apprend que les « pouranpoli » sortes de gâteaux de pois-chiches peuvent faire office de philtres d’amour, et à la lecture du livre, on a une seule envie c’est de goûter les « bombil » (poisson traditionnel) de Rachel.
L’eau à la bouche et l’esprit en voyage, que demander de plus à un livre ?
Esther David, « Le livre de Rachel », Trad. Sonja Terangle, Eho, 300 p., 21 euros.
« Normalement, Rachel ne faisait des Pouranpoli qu’une seule fois par an, à l’occasion de Pourim. Quand elle était seule, elle en préparait juste deux, un pour le déjeuner et l’autre pour le dîner, mais quand il y avait de la famille, elle en faisait d’avantage. Exceptionnellement, elle en cuisinait lorsqu’elle était particulièrement heureuse, par exemple, à la naissance d’un petit-enfant » p. 175
Pour en savoir plus sur les Juifs d’Inde, cliquez ici.
Yaël Hirsch
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2 thoughts on “Roman : Esther David, Le livre de Rachel”
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Jean Claude
Excellent!