L’homme qui aimait ma femme : Simonetta Greggio rejoue Jules et Jim dans le Paris d’après mai 68
L’auteure italienne et écrivant en français de “La Douceur des hommes” (2005) et de “L’odeur du figuier” (2011) donne sa version libre et nostalgique de “Jules et Jim”. Un trio amoureux qui traverse les années 1960 et 1970, non sans heurts, malheurs et douleurs, mais avec une solide volupté. Un roman référencé et nostalgique publié cet automne chez Stock.
Alexandre et Yann sont frères. Le premier et aîné est un coureur invétéré qui devient prof de lettres, le deuxième et cadet un grand romantique qui se cherche entre Normale Sup’, une cabane dans les bois et le droit comme passeport pour la finance internationale. Yann présente LA femme de sa vie à Alexandre qui s’empresse de lui voler… non sans continuer à la tromper allégrement. Cette femme, c’est Maria, sensuelle, jalouse, fidèle, auteure de biographie et rescapée d’un accident de voiture majeur au bel âge après avoir réalisé qu’Alex la trompait avec… sa sœur. Tous trois traversent, liés par le destin, la deuxième moitié du 20ème siècle dans une France mi-intello (Lacan, Althusser …), mi- désengagée de toute implication qui dépasse les égoïsmes individuels.
Remake de Jules et Jim sous l’œil narquois du post-structuralisme et de la liberté des mœurs et des corps, “L’homme qui aimait ma femme” éclate en points de vues narratifs divers un trio d’amour et de douleur plus solide que toutes les convictions successives du demi-siècle dans lequel il s’inscrit. Extrêmement référentielle, Simonetta Greggio tend à faire un peu trop étalage de sa très grande connaissance de la vie intellectuelle parisienne des années 1970. Mais elle est toute excusée quand on sait lire ces débordements par ailleurs joliment énoncés comme une déclaration d’amour à sa langue et son pays d’adoption.
Simonetta Greggio, “L’homme qui aimait ma femme”, Stock, 304 p., 20 euros, Sortie le 22 août 2012.