Cinema
“Carré 35”, documentaire intimiste sobre et subtil [Cannes 2017, Hors Compétition]

“Carré 35”, documentaire intimiste sobre et subtil [Cannes 2017, Hors Compétition]

22 May 2017 | PAR Geoffrey Nabavian

De façon très, très sobre, et sans rage ni empressement, Éric Caravaca branche sa caméra à la première personne, et fait le point sur un décès dans sa famille, longtemps passé sous silence. Il brasse des thèmes, et émeut pas mal.

[rating=4]

Objet très personnel que ce film signé par Éric Caravaca, artiste d’abord révélé en tant qu’acteur, notamment dans C’est quoi la vie ? (1999) ou La Chambre des officiers (2001), tous deux signés François Dupeyron. La forme qu’il choisit s’étire sur une durée courte (1h07) et voit sa famille parler face à l’écran, tandis que lui les questionne, montre ce qu’il découvre, et raconte. Il retrouve des faits, en s’en tenant, au niveau des images, aux vestiges, sans rien reconstituer. Chaque intervenant a son morceau de bravoure, parfois dur à lâcher : le père est rempli d’absences, l’oncle se rappelle du moment où il a fait la découverte fatidique, cœur du film… Et la mère ne veut pas (s’)avouer certains détails, pourtant essentiels. Notre narrant, lui, découvre, en même temps que nous

En une forme très sobre, Carré 35 avance, et au passage, certains faits qu’il raconte nous touchent tout à coup fortement… La quasi totalité des archives liées à la personne morte, décédée en 1963, furent détruites. Toute complaisance s’évite donc. Maroc, Algérie, guerre, handicaps et difficultés de vie, en passant par des vestiges actuels, se mêlent, sans insistance. La partition discrète de Florent Marchet marche à l’unisson des images : ses teintes aux couleurs diverses, aux tons différents, tâchent d’épouser la forme de ce documentaire…

L’intelligence du montage des images, et du récit déroulé, sur lequel Éric Caravaca et l’écrivain Arnaud Cathrine ont travaillé tous deux, tiennent en haleine, et ménagent des ruptures discrètes, qui surprennent. Le film est un chemin vers des faits… Et à l’image de cette fenêtre qui l’ouvre et le clôt, et que la caméra cadre en se limitant à son extérieur, sans montrer ce qu’elle cache, Éric Caravaca n’en fait pas trop : modeste, son documentaire ultra intimiste n’en demeure pas moins parfaitement au niveau de son sujet. Les leçons, règlements de comptes, généralités et psychodrames auraient pu guetter…

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Visuel : © Pyramide Distribution

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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