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Impressions musicales: l’Orchestre de Paris et Lise de la Salle à la Philharmonie

Impressions musicales: l’Orchestre de Paris et Lise de la Salle à la Philharmonie

28 May 2023 | PAR Jean-Marie Chamouard

 

Le 24 et 25 mai 2023, à la Philharmonie, l’Orchestre de Paris interprète Vers la voûte Étoilée de Charles Koechlin, le Concerto pour piano n°2 de Frédéric Chopin, Quatre Interludes marins de Benjamin Britten, et la Mer de Claude Debussy. Ce soir Ariane Matiakh dirige l’Orchestre de Paris et Lise de la Salle est au piano.

La superbe méditation de Charles Koechlin

«Vers la voûte étoilée» résulte des deux passions de Charles Koechlin (1867-1950), la musique et l’astronomie. Il sera célèbre pour son traité de composition, son œuvre musicale sera considérable mais Vers la voûte étoilée ne sera pas joué de son vivant et ne sera crée qu’en 1989 à Berlin. C’est un nocturne symphonique, une méditation face au cosmos. Le doux jeu des cordes accompagné des flûtes conduisent l’auditeur vers une douce nuit estivale. La musique devient mélopée, rythmée par des percussions, toutes en retenue. Un chant céleste s’élève porté par les cuivres, puis survient un crescendo qui célèbre la grandeur du cosmos avant le retour au calme initial, à la seule sérénité nocturne. L’œuvre se termine par un aigu des violons tel un point d’interrogation du musicien face au cosmos.

Lise de la Salle: une pianiste talentueuse

Elle arrive telle une vedette! La jeune pianiste française interprète une œuvre célèbre, le deuxième concerto pour piano de Chopin, composé à l’âge de 19 ans à Varsovie. Après une longue et mélodieuse introduction de l’orchestre, l’entrée du piano est majestueuse, spectaculaire. Le jeu de la pianiste est limpide, précis, riche en émotions. Ce premier mouvement allie: énergie, virtuosité et romantisme dans un équilibre subtil.
Le larghetto est un chant d’amour dédié par Chopin à la cantatrice polonaise Konstancja Gladkowska. Le piano domine tout le mouvement souvent accompagné du seul murmure des cordes, il chante une très belle mélodie, une mélodie que Schumann et Liszt aimaient tant. Elle exprime tour à tour la douceur, la tendresse, la passion. Elle s’achève comme dans un soupir. Lise De la Salle est très émouvante dans ce poème d’amour.
Le troisième mouvement Allegro vivace est une Mazurka. Joie, légèreté, vivacité s’imposent, témoignant de l’enthousiasme de la jeunesse. Grâce à sa virtuosité, à sa sensibilité, la soliste nous a offert une interprétation séduisante de ce célèbre concerto.

Quatre courtes marines musicales

Benjamin Britten est né et a longtemps vécu dans le Suffolk près de la Mer du Nord. Les Quatre Interludes marins sont issus de son premier opéra Peter Grimes qui se situe dans un village de pêcheurs. Quatre brèves pièces symphoniques, qui témoignent des atmosphères changeantes du bord de mer. Une musique est très expressive! Les altos reproduisent le bercement des vagues, les flûtes le cri des mouettes. La mer paraît indifférente aux cloches qui sonnent en ce dimanche matin. Le xylophone nous suggère le clapotis des vagues dans le calme du clair de lune. Le quatrième tableau est bien différent, la tempête éclate subitement. Les percussions sont puissantes, menaçantes, le rythme imposé à l’orchestre est haletant, précipité, chaotique. Le déchaînement des éléments paraît inexorable, parfaitement illustré par l’orchestration de Benjamin Britten. Saisissant.

L’impressionnisme concerne aussi la musique:

«En regardant la mer, vous n’aurez pas de sensations aussi fortes qu’en écoutant la Mer de Debussy. C’est la perfection même» disait le pianiste Sviatoslav Richter. La Mer, composée entre 1903 et 1905 comporte trois esquisses symphoniques, qui sont trois «tableaux maritimes». L’orchestration est particulièrement complexe et imaginative, nécessitant tout le talent de la cheffe Ariane Matiakh. Elle dirige l’orchestre de Paris avec simplicité, énergie, précision. Cette musique est très suggestive. Nous sommes à l’aube, la harpe débute seule, rejointe tout en douceur par les violons. Le cor anglais et les trompettes en sourdines développent un très beau thème. La musique est fluide, fondue, l’ambiance sonore, très agréable, évoque un milieu aquatique. Les violoncelles tous ensembles imitent le roulement des vagues. Les flûtes se détachent comme des chants d’oiseaux au dessus de la mer. Puis les cors et trombones deviennent triomphants témoignant de la grandeur de la nature à l’apogée du jour. Dans le deuxième tableau le bruissement des cordes évoque les jeux des vagues. L’auditeur remarquera les clapotis du xylophone, le ruissellement de l’eau, parfaitement rendu par la harpe. Dans le troisième tableau, de dialogue du vent et de la mer, l’humeur est changeante. La musique devient imprévisible, comme les éléments, avec des rythmes irréguliers, de brusques accélérations, des tourbillonnements inquiétants, mais le doux bercement des vagues survient à nouveau, porté par la harpe et les flûtes. La fin est grandiose, les percussions et tout l’orchestre se déchaînent comme ci le flot des vagues devenait raz de marée.
La mer, le vent les étoiles: lors de ce concert la musique s’inspire de la nature, le musicien devient aussi un peintre, créant une musique symphonique particulièrement imaginative, originale, sensible. Pour le plus grand bonheur des auditeurs.

Visuel:© JMC

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Jean-Marie Chamouard

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