Gabrielle Chanel, sous toutes ses coutures
L’exposition Gabrielle Chanel. Manifeste de mode, ouverte depuis le 1er octobre 2020 au Palais Galliera, est prolongée jusqu’au 18 juillet prochain afin de pallier à la fermeture du musée ces derniers (tristes) mois.
Un manifeste de mode écrit par le vêtement
Plus qu’une rétrospective de la vie de celle qui porte ce nom illustre de son vivant même, l’exposition du Palais Galliera expose sans artifice les vêtements et accessoires qui ont fait la renommée de Chanel. Dans cet écrin tapissé de noir et plongé dans une scénographie obscure, les tailleurs structurés et les robes ajustées s’offrent à l’admiration de notre regard. Les quelques textes accompagnant çà et là les mannequins revêtus des vêtements dignes des plus grandes collections restent peu nombreux, et soulignent justement l’importance de l’observation, de la délectation. L’exposition entend ainsi retracer la biographie de Gabrielle Chanel par la chronologie de ses créations, dont chaque couture, chaque bouton, chaque échancrure… En somme, chaque décision (audacieuse) traduit une nouvelle étape de sa vie, et, toutes réunies, composent son Manifeste de mode. De Biarritz à la rue Cambon, du chapeau porté sur la côte basque au tailleur arboré dans les rues de la capitale : l’histoire de Chanel est regroupée entre les murs du musée, parfois protégée de verre, parfois exposée sans intermédiaire. En tout cas trop précieuse pour être portée, mais seulement admirée.
Un style acéré et affirmé : l’intemporelle silhouette Chanel
Dans la première salle de l’exposition, une simple chronologie retrace la vie de Gabrielle Chanel à travers une vingtaine de dates, chaque année coïncidant avec une nouvelle étape dans l’avancée de la maison de mode éponyme. Et, bien que ces dates nous paraissent éloignées, elles sont le témoin d’un style intemporel, qui possède encore aujourd’hui tout son potentiel. De la petite robe noire dans les années 1920 jusqu’au tailleur emblématique dans les années 1950, Gabrielle Chanel se manifeste par ses silhouettes acérées, affirmées, structurées ; “refusant l’ornement superflu, [elle] fait toujours un usage juste et audacieux des couleurs, des matie?res, des techniques, privile?giant l’e?quilibre et la vision harmonieuse de l’ensemble“(Miren Arzalluz, directrice du Palais Galliera). Les lignes des robes de soie accompagnent le mouvement des hanches ; les broderies rencontrent le velours dans une robe de rouge éclatant ; le tailleur épouse les boutons qui le rythment et soulignent l’attitude de celle qui le porte, féminine et confortable, élégante et simple.
Des vêtements aux accessoires, chaque ornementation, chaque couture, chaque courbe et chaque matière constitue le Manifeste de mode de Gabrielle Chanel, qui, pour citer sa contemporaine Colette, “travaille des dix doigts de l’ongle, du tranchant de la main, de la paume, de l’épingle et des ciseaux, à même le vêtement, qui est une vapeur blanche de longs plis, éclaboussée de cristal émietté” (Bravo, avril 1930). La coupe est franche et assumée, du chapeau qu’elle confectionne au début du siècle jusqu’au tailleur qu’elle ambitionne en 1950. Une partie de l’exposition nous dévoile également l’art de la joaillerie chez Chanel ; des parures aux couleurs éblouissantes, qui semblent toutes antiquisantes, voire égyptisantes, sans pour autant oublier l’intervention “tranchante” de leur créatrice. Les carrés d’émeraude côtoient les courbes dorées d’une broche, des sphères de topaze sont incrustées dans un collier en or massif…
L’exposition Gabrielle Chanel. Manifeste de mode est à voir au Palais Galliera jusqu’au 18 juillet (sur réservation).
Visuels : © photographies Camille Bois–Martin