
Fanny, une splendide pièce de Rébecca Déraspe et Rémy Barché au Théâtre Ouvert
Fanny, c’est l’histoire d’un couple quinquagénaire qui rencontre les questions d’aujourd’hui. Le texte de Rébecca Déraspe, mis en scène par Rémy Barché, est d’un délicieux équilibre, étoffé de nuances intelligentes. C’est une poésie drôle et philosophique qui fait émerger les paradoxes de ces idées progressistes.
Rapports d’existences
Quand Alice, étudiante en philosophie, débarque chez un couple aux idées engourdies, elle provoque un vrai remue-méninges. Entre questions d’identité, de genre, de nouveau féminisme, d’écologie etc., Fanny se retrouve face à une nouvelle éthique, celle portée par la jeunesse. C’est un choc des générations qui se passe, ici, pour le mieux.
Accepter le changement, se remettre en question, accepter d’être en retard, de ne pas avoir suivi les évolutions du monde, et surtout, de vouloir y réfléchir et en discuter, changer. C’est l’attitude de Fanny et de son conjoint, qui la suit et l’accepte dans ses bouleversements.
Prendre le temps, entrer dans la nuance
Le décor dresse un intérieur aisé et réglé, chaque chose y a sa place. C’est un milieu bien choisi, avec des personnages construits habilement, il y a une telle cohérence qu’on y croit. On croit en cette femme, qui existe, pour de vrai. Et on aimerait rencontrer plus de Fanny, capables de s’ouvrir au monde et aux idées qu’il·elle·s ne comprennent d’abord pas vraiment.
Car ce sont des questions complexes qui ont le mérite d’être, dans ce spectacle, développées pendant plus de deux heures. Si Fanny essaie de comprendre et non pas de se braquer contre ces idées qui déconstruisent et redéfinissent le monde, elle en explore néanmoins les paradoxes et se demande comment vivre avec eux.
Une légèreté fantasque
Les comédiens Daniel Delabesse, Elphège Kongombe et Gisèle Torterolo transmettent avec humour une pluralité de questions qui appellent à la relecture du texte. Avec en leitmotiv les “ok” et “je t’aime”, la pièce a le mérite de délivrer avec simplicité des messages clairs et délicats. L’équilibre entre philosophie, poésie et accessibilité, fait du bien et la pièce ne tombe jamais dans l’extrême.
Il est toujours amusant de voir une quinquagénaire revivre, vivre une jeunesse. Mais c’est surtout beau, beau de voir danser et se déconstruire les visions stéréotypées. Parler sans tabous, parler de tout, mais surtout parler, discuter, c’est ce que fait cette pièce et ce qu’elle invite à faire. A travers les personnages, le texte résonne et percute les pensées des spectateur·rice·s, il cherche à susciter les discussions.
La pièce est très riche et explore des terrains variés mais tous liés, on en ressort avec l’espoir d’une union collective intergénérationnelle pour un avenir lumineux et égalitaire.
Fanny, c’est un spectacle à voir absolument, jusqu’au 23 janvier 2022 au Théâtre Ouvert !
Visuels : @Joseph Banderet