« Inventer le désir. Œuvres choisies » de Camille Laurens : Désir d’aimer et désir d’écrire
Après Christian Bobin et Erri de Luca, la collection Quarto Voix contemporaines de Gallimard rassemble des œuvres de l’écrivaine Camille Laurens.
Lorsqu’elle a dû constituer ce Quarto, Camille Laurens s’est repenché sur des livres écrits il y a parfois une trentaine d’années, et rarement relus. A partir de là, comment trouver un sens à une œuvre ? Quel fil conducteur donner aux différents romans ? Comme elle le dit en Préface, Camille Laurens met avant le désir tout au long de ses livres : « leurs personnages me ressemblent, ils cherchent plus ou moins timidement l’autre face, l’envie de vivre, l’énergie vitale, ils montrent une sorte d’acharnement au désir. »
Car le désir, c’est celui qui irrigue Celle que vous croyez, désir de Christophe pour Claire, une femme de presque cinquante ans qui a créé un faux profil sur Internet pour surveiller son amant. Drôle et habilement construit, le roman est aussi une vraie réflexion sur les réseaux sociaux, l’anonymat, le temps qui passe et la peur de vieillir. Le désir, c’est aussi celui que l’on retrouve dans Dans ces bras-là, « un livre sur les hommes, sur l’amour des hommes : objets aimés, sujets aimants, ils formeraient l’objet et le sujet du livre ». Tous les hommes y passent, du père à l’amant, du professeur au grand-oncle, avec la volonté de cartographier.
Camille Laurens est également une écrivaine, et non un écrivain (« en 1991, à la parution d’Index, je me suis dit, je m’en souviens : « Ca y est, tu es écrivain ». En 2023, feuilletant mon volume Quarto, je me dis : « Voilà tu es écrivaine. » »). Il y a bien sûr Fille, récit et réflexion sur ce qu’est être une femme, ou plutôt sur comment on devient une femme. Pour étoffer la réflexion féministe, le Quarto regroupe également plusieurs appendices, comme un long entretien avec Florent Georgesco (« il y a eu une évolution, car les femmes à la fenêtre, dans les générations précédentes, sont une figure d’attente vaine et bovaryste du prince charmant qui n’arrive jamais. Alors que moi, j’en fais une figure de la création artistique. […] La femme à la fenêtre est devenue une figure du désir. »), un texte comme « L’Amour tout court » (« Moi, ce qui m’intéresse, c’est la différence des sexes. ») ou encore un entretien croisé avec Annie Ernaux réalisé en 2011.
Inventer le désir. Œuvres choisies, Camille LAURENS, Gallimard, Quarto, Voix contemporaines, 1024 pages, 26 €
Visuel : Couverture du livre
