[Live report] Robyn Orlin, quelques malabars, Frédéric Ferrer et des moustiques tigres font rire, dernière « Nuit nomade » de Juillet
Deux performances étaient au programme de la dernière Nuit nomade de juillet, ce jeudi 24 juillet, à la Fondation Cartier. la chorégraphe Robyn Orlin a repris une performance qu’elle avait créée à la Fondation en 2008, dansée et interprétée par Seydou Boro. Et le géographe et acteur Frédéric Ferrer a proposé un cours assez détonnant et irrésistiblement comique sur la déterritorisalisation des moustiques-tigres.
En entrant dans la Fondation Cartier, l’usage, ce jeudi 24 juin, était de prendre un malabar pour aller s’asseoir en mâchonnant autour de la scène à 360 degrés. Grand, énergique et mince, Seydou Boro est entré avec le sourire pour servir un personnage imaginaire, “César”. Laissant ses vêtements à cet esprit belliqueux, il est resté à chantonner en caleçon et en chaussettes, avant de quémander à quasiment l’ensemble du public ses chewing-gum mâchonnés : “Chewing-gum s’il vous plait!” Comme souvent dans les performances de la chorégraphe sud-africaine, le plus troublant est la manière dont le public se prête au jeu, avec une docilité au moins aussi dérangeante que les actes absurdes que celle-ci permet. Mêlant les ADN selon de belles lignes géométriques, il a aussi étalé quelques autres offrandes à César (dont le soutien-gorge d’une spectatrice) avant de demander leggings et chemises pour se parer pour une sorte de danse rituelle. Rendant le moment du don de chaque objet très solennel, mais toujours avec le sourire, il a tiré sur la gêne des spectateurs comme sur la pâte de chewing-gum usagée : avec une grâce infinie. Absurde, musicale,un peu cra-cra et drôle la performance “Je suis venu… J’ai vu… J’ai mâché des malabars” s’est terminée sur une tendre restitution des objets (sauf les chewing-gums, qui ont été amalgamés).
Une quinzaine de minutes de pause a permis de profiter du beau panorama qu’offre la nef de verre de la Fondation Cartier en sirotant un verre de vin. En rentrant, les tables étaient remises d’équerre face à l’écran pour mime rune très sérieuse salle de conférence. Armé de son power-point aussi laid que léché de schémas “scientifiques”, Frédéric Ferrer est entré en scène et nous a dit tout de go qu’il ne pouvait faire sa conférence sur “Les déterritorialisations du vecteur, cartographie 3” en moins d’une heure.
Très structuré, bardé de définitions philosophiques et scientifiques, reposant probablement sur des faits avérés, sa narration universitaire se veut alarmante sur la propagation planétaire du Moustique-tigre (qu’il appelle tout au long de la conférence de son nom scientifique, mais en abrégé : Aedes albopictus devient “Albo”, ce qui fait très “animal domestique”). Ce dernier s’adapte en effet aux milieux humains et est “vecteur” de maladies graves : les dengues (il y en a 4 types) et le chikungunya. Pastichant tous les travers de l’universitaire tentant de vulgariser sa recherche, se mettant en scène en recherche sur des photos et des vidéos irrésistibles, il est absolument brillant lorsqu’on souffre pour lui de ne pouvoir trouver de solution systématique et scientifique à ce que son personnage définit, tel le poisson dans son bocal, comme le plus terrible danger qui menace l’humanité. Un spectacle hilarant, très intelligent (on apprend en fait beaucoup de choses avérées) et hyper profond de réflexion sur des questions aussi profondes que celles de risque, d’hypothèse scientifique et de frontière. Un grand moment de catharsis, où l’on suit “les grands bonds d’Albo” d’aire d’autoroute en aire d’autoroute avec une tendresse amusée, plutôt qu’avec effroi…
visuels : Cybèle & Yaël
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