Opéra
Un soir de réveillon : Les brigands réveillent le théâtre de l’usine à Saint-Céré

Un soir de réveillon : Les brigands réveillent le théâtre de l’usine à Saint-Céré

24 August 2022 | PAR Hélène Biard

Bien que nous soyons en plein mois d’août, Les brigands ressortent des placards Un soir de réveillon de Raoul Moretti (1893-1954), une opérette créée en 1932 et aussitôt oubliée. La soirée, qui se déroule dans le bistrot du théâtre de l’usine s’annonce aussi déjantée que celle de la veille.

Une mise en scène dynamique qui intègre le public

Après Yes !, c’est le duo Vladislav Galard et Bogdan Hatisi qui signe la mise en scène de cette deuxième opérette au programme du festival de Saint-Céré. Les artistes, qui endossent de nouveaux rôles circulent dans toute la salle et prennent un malin plaisir à fêter noël en plein été. La disposition de la salle, pensée pour intégrer le public à l’action est située juste à côté du bar et derrière la salle « principale » du théâtre de l’usine ou est donnée Yes !. Si la mise en scène est bien pensée et totalement réussie, elle est grandement aidée par les lumières de Yvon Julou qui distille avec un art consommé des atmosphères propres à entraîner le public dans une ambiance à la fois très cosy et tourbillonnante qui donne au chef-d’œuvre de Moretti cette aura folie douce qui règne pendant toute la soirée.

Des comédiens chanteurs déchaînés bien accompagnés

Le public retrouve avec plaisir une partie des artistes de la compagnie qui changent de « peau » à volonté et avec gourmandise. Ainsi, Emmanuelle Goizé passe , avec une aisance confondante, du rôle de Marquita Negri (Yes !) à celui de Viviane, rôle créé par Arletty en 1932, comme si la gouaille de la créatrice du rôle était passé par delà les années dans chaque fibre de sa lointaine collègue. La scène de la baignoire, qui fit se déplacer les foules en 1932 pour y voir Arletty, est LE grand moment de la soirée. Et Goizé s’amuse beaucoup à l’interpréter. Gilles Bugeaud, Saint Aiglefin hilarant la veille est un Monsieur Lepage plein d’humour et d’attentions pour sa fille Monique. Si Landier, le fiancé éphémère de Monique marque les esprits c’est surtout par son costume, caricatural et sa pingrerie, et Carbonnier, l’ami de Viviane n’apparaissent qu’une fois dans le chef-d’œuvre de Moretti c’est la scène dans le restaurant japonais ou il campe un serveur japonais qui vaut surtout son pesant de cacahuètes. On retrouve aussi Flannan Obé (Roger, le barbier/chanteur dans Yes !) qui est un Honoré à la fois touchant et très sur de lui. Le domestique polyvalent des Lepage veille sur Monique Lepage avec un soin jaloux et chacun a pu apprécier le réel talent de Obé qui entraîne ses collègues vers le haut. Son interprétation de « c’est fini » est de haute volée et le public l’apprécie à sa juste valeur. La jeune Sarah Charles et une Monique Lepage de très belle tenue. Cette fausse ingénue sait très bien ce qu’elle veut et mène son monde par le bout du nez, à commencer par son père et Gérard Cardoval, cet ex riche industriel qui a tout plaqué à Roubaix, y compris son épouse qu’il n’a jamais aimé. C’est Romain Dayez qui incarne Gérard Cardoval, et il le fait avec talent ; pendant toute la soirée il chante et joue la comédie avec beaucoup de plaisir. Vladislas Galard ne se contente pas de co-signer la mise en scène ; il joue aussi la comédie et il complète la distribution avec bonheur. Au piano, c’est Paul Marie Barbier qui accompagne l’ensemble des artistes présents sur la scène du théâtre de l’usine ; avec Matthieu Bloch à la contrebasse, il s’amuse beaucoup et la musique de Moretti envahit agréablement la salle.

Les Brigands ont donné un nouvel exemple de leur talent à dénicher de véritables raretés ; cette nouvelle production de Un soir de réveillon, pleine d’allant et totalement déjantée a aussi permis à des artistes de talent de jouer la comédie à fond tout en chantant des mélodies charmantes ou totalement décalées.

La suite du festival est ici.

Visuel : ©Loran Courrau.

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Hélène Biard

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