
Promotions au Ballet de l’Opéra de Paris : un concours riche en rebondissements
Derrière la magie du Ballet de l’Opéra de Paris, il y a une hiérarchie rigoureuse et parfois impitoyable. Un concours de promotions annuel permet d’en gravir les quatre premiers échelons, les Danseurs Etoiles étant nommés pour leur part sur proposition du Directeur de la danse. L’édition de cette année fut riche en rebondissements symptomatiques de la profonde mutation opérée par Benjamin Millepied, à la tête de la troupe depuis le 1er novembre dernier.
Laura Hecquet (promue Première Danseuse) – photos Sébastien Mathé
Le Ballet de l’Opéra National de Paris s’articule en grades hiérarchiques très normés, sur la base desquels sont attribués les rôles de corps de ballet (Quadrilles et Coryphées) ou de solistes (Sujets, Premiers Danseurs et Danseurs Etoiles). Si les Danseurs Etoiles sont nommés à l’issue d’une représentation publique sur proposition du Directeur de la Danse ; c’est un concours interne qui permet néanmoins l’évolution des carrières depuis le grade de Quadrille jusqu’à celui de Premier Danseur.
Les artistes candidats à une promotion présentent chacun une variation imposée et un morceau libre issus du vaste répertoire du Ballet, devant un jury mêlant danseurs de la troupe et personnalités externes. L’événement se déroule au Palais Garnier devant un public d’invités : les familles des danseurs et personnalités du milieu culturel sont prioritaires. Cette spécificité ne laisse pas de générer frustration et fascination chez les balletomanes, impuissants à pénétrer les arcanes feutrées de la politique interne.
Je cherche une place pour le concours de promotion et une licorne dorée.
— Jade (@Jade_Lgt) 3 Décembre 2014
Le concours du 3 et 6 décembre 2014 était le premier à se tenir sous l’égide du nouveau Directeur de la danse Benjamin Millepied, entré en fonctions le 1er novembre dernier. Succédant à Brigitte Lefèvre et ses vingt ans de « règne », le chorégraphe américain avait annoncé d’emblée sa ferme volonté de réformer l’institution, en l’ouvrant davantage sur l’international et en la dépoussiérant de ses rigueurs structurelles. Le concours de promotions paraissait concentrer à ce titre les enjeux politiques de l’ « ère » Millepied.
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Ce dernier n’a jamais caché son hostilité face à ce procédé inédit dans les compagnies du monde entier : les danseurs sont en effet jugés davantage sur leur courte performance du jour J et ses impondérables ; que sur leurs apparitions scéniques tout au long de l’année. Le plébiscite n’a ici aucune prise, et les résultats suscitent traditionnellement bon nombre de réactions amères. Interrogés par QCM, les danseurs du Ballet ont cependant exprimé leur attachement à cette épreuve, qui leur permet de s’émanciper un temps de leurs fonctions auxiliaires pour s’essayer à un premier rôle.

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Résultat de ces débats et affrontements des volontés, un concours pas tout à fait comme les autres ; mêlant justice, cohérence et une forme d’irrévérence symptomatique d’une période de transition. Sur les 13 places vacantes, seules 9 ont ainsi été attribuées. Les aléas du jour n’ont pas été déterminants d’autre part, de sorte que les promotions révèlent directement les choix artistiques de Benjamin Millepied et les espoirs qu’il souhaite mettre en avant.
Les résultats officiels ont été publiés sur le site de l’Opéra National de Paris:
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Coryphées
– Mademoiselle Ida VIIKINKOSKI
– Mademoiselle Jennifer VISOCCHI
Sujets
– Mademoiselle Léonore BAULAC
– Mademoiselle Hannah O’NEILL
Première Danseuse
– Mademoiselle Laura HECQUET
Coryphées
– Monsieur Antoine KIRSCHER
– Monsieur Florent MELAC
Sujets
– Monsieur Germain LOUVET
– Monsieur Hugo MARCHAND
Premier Danseur
Aucune majorité n’étant dégagée à l’issue du quatrième tour de scrutin pour la 1ère place, le classement n’est pas effectué.”
Les résultats de la classe des coryphées semblent particulièrement cohérents et prévisibles : Benjamin Millepied avait en effet choisi trois de ces jeunes danseurs (Léonore Baulac, Germain Louvet et Hugo Marchand) pour interpréter les rôles principaux dans Casse-Noisette, et ce au mépris de la hiérarchie. Antoine Kirscher, Florent Melac, Hannah O’Neill et Ida Viikinkoski sont des nouvelles recrues dont le talent parfois révélé à l’étranger ne demande qu’à s’épanouir sur les scènes parisiennes. Plus anciennes dans la compagnie, Jennifer Visocchi et Laura Hecquet sont de solides danseuses qui attendaient leur heure : enfin récompensées, elles auront davantage d’occasions de briller désormais.

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Si tous les postes n’ont pas été pourvus, signant la fin d’un régime parfois abusivement méritocratique et formaliste ; les talents ne manquent pas pour autant. Des danseurs comme Laetitia Galloni (Coryphée), Héloïse Bourdon (Sujet), Sae-Eun Park (Sujet), Pablo Legasa (Coryphée), Florimond Lorieux (Sujet), Sébastien Bertaud (Sujet) et Allister Madin (Sujet) restent à suivre…
Visuels: © Sébastien Mathé – Opéra National de Paris
A la une: Hannah O’Neill, photo Sébastien Mathé
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One thought on “Promotions au Ballet de l’Opéra de Paris : un concours riche en rebondissements”
Commentaire(s)
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Jade
Merci mais j’ai trouvé une place grâce au réseau balletomane ! Reste la fameuse licorne dorée…