Danse
« Je m’efforcerai de te suivre » : une création poétique et désenchantée

« Je m’efforcerai de te suivre » : une création poétique et désenchantée

20 May 2015 | PAR Flora Vandenesch

La chorégraphe Rita Cioffi et la danseuse Stéphanie Marc nous livrent une pièce hybride mêlant pas dansés, chants et interprétations. À l’origine de la création, il y a  la rencontre de deux femmes autour du recueil de poésie de Michel Houellebecq, Configuration du dernier rivage. Entre désillusion et légèreté, Je m’efforcerai de te suivre offre la vision d’une féminité assumée.

[rating=3]

Sur le plateau, deux femmes. Et en second plan, un homme qui les accompagne. Habillées de noir, en justaucorps sobre et tenue légère, elles vivent leur singularité et se rejoignent dans le mouvement. Doubles et complices, elles ne font qu’une. Elles sont toutes les femmes. A la fois singulières et anonymes, elles deviennent silhouettes ombrées sur fond d’écran couleur, noyées dans les images et le texte. Habitées par la tristesse ironique des poésies de Michel Houellebecq, Rita Cioffi et Stéphanie Marc, toutes deux frôlant la cinquantaine, questionnent le devenir du corps et de l’esprit face aux ravages du temps qui passe, dans un monde déshumanisé où les machines prennent trop de place. Quand le corps féminin est sur le point de lâcher prise, quand il devient unique objet du désir masculin ou corps désarticulé à la merci de directives télématiques, il reprend bientôt sa liberté, entre dans la danse comme dans une transe, vient se désaltérer à l’eau qui ruisselle sur le devant de la scène et devient léger, ouvert au champs des possibles.

Les vers du recueil de poésie Configuration du dernier rivage, vibrent tout au long de la pièce, si bien qu’on a l’impression qu’un peu de l’écrivain est là, avec nous, porté par la voix de la comédienne. Avec la complicité de l’artiste multimédia David Lepolard, les danseuses s’emparent du cynisme de Michel Houellebecq. On retrouve le côté trash, lié à l’impudeur provocante de l’auteur, mais aussi un côté désuet, qui cultive ici la rime classique et le sentimentalisme. Le texte circule sur le plateau, parlé, écrit, faisant naître des images et des gestes. Inscrites au mur, des bribes de poésie défilent, comme une bande-son entêtante qui parfois s’arrête sur quelques mots, suspendue. Si le choix du texte est heureux, le traitement manque d’originalité. Et malgré la belle présence des interprètes, la pièce reste fragile, hésitante, encore parfois à l’étape d’exploration.

Crédits photos : @Pierre Neuvéglise

Je m’efforcerai de te suivre, Chorégraphie et interprétation : Rita Cioffi, Stéphanie Marc. A la Parole Errante, 9 Rue François Debergue, 93100 Montreuil.

Présenté dans le cadre du Festival Les Rencontres Chorégraphiques de Seine Saint Denis.

Meryl Streep finance Writers Lab, un projet contre le sexisme à Hollywood
[Quinzaine] « Les chansons que mes frères m’ont apprises » : un premier film poétique et fort sur l’attachement à ses racines
Flora Vandenesch

Publier un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Your email address will not be published. Required fields are marked *


Soutenez Toute La Culture
Registration