
Erik Truffaz fait son cinéma au Théâtre de l’Odéon
La 22è édition du festival Jazz à Saint-Germain-des-Prés s’est clôturée le 17 mai dernier et a une nouvelle fois tenu ses promesses avec un florilège d’artistes produits dans des lieux uniques. Après Yaron Herman à la Monnaie de Paris, Rhoda Scott à l’Eglise Saint-Sulpice, Richard Galliano à la Maison de l’Océan, Erik Truffaz nous présentait en quintet au Théâtre de l’Odéon son dernier album dédié au cinéma. Un très bel hommage au jazz et au 7è art.
Une introduction poétique
Quelques néons blancs plantés à la verticale délimitent la scène du théâtre de l’Odéon, plongée dans un bleu intense. Des faisceaux lumineux aux couleurs changeantes éclairent des volutes de fumée évanescentes. Matthis Pascaud (guitare) et Alexis Anérilles (claviers) sont les premiers à s’avancer sur le plateau, parsemé d’instruments, d’amplis et de micros. Ils s’installent et commencent à jouer.
Fa do la sol : les cordes de la guitare résonnent dans l’espace et créent immédiatement un climat de douceur et de beauté. Le clavier émet un son cristallin et l’on croit entendre des gouttes d’eau qui s’éparpillent. Les instruments se répondent et forment un entrelacs poétique et gracieux, nous plongeant irrémédiablement vers un ailleurs ouaté. On devine alors au loin le souffle d’Erik Truffaz dans sa trompette.
Tenue noire intégrale et chapeau de feutre assorti, on l’observe déambuler dans l’obscurité, précédé de son instrument qui se met à briller sous les projecteurs. Il prend son temps, semble savourer son entrée en scène et le public l’accueille avec enthousiasme. En guise d’ouverture, c’est la musique de Nino Rota qui est choisie. Celle qui illustrait magnifiquement le film de Federico Fellini La Strada (1954). Une sorte de mélancolie s’installe et l’on ressent une certaine nostalgie à l’évocation de Gelsomina et de de Zampano.
C’est alors au tour de Marcello Giuliani (basse) et de Raphaël Chassin (batterie) de faire leur apparition. Le quintet est au complet et la musique résonne de plus belle avec le thème de Fantomas. La soirée s’annonce cinématographique puisque les titres choisis par le trompettiste rendent hommage aux films qui l’ont marqué.
Rollin’ & Clap
Rollin’ (Blue Note) est le 17è album d’Erik Truffaz sorti début avril. 9 titres mettent en lumière les compositions des plus grands d’Ennio Morricone à Miles Davis en passant par Michel Magne et Philippe Sarde. Les bandes originales de films cultes (Le casse, Ascenseur pour l’échafaud, les Tontons flingueurs…) sont ici revisitées avec élégance et sensibilité. Un deuxième volet intitulé Clap est prévu pour la fin de l’année et quelques titres ont été présentés au Théâtre de l’Odeon en avant-première.
Pour nous lire la lettre de Rosalie (César & Rosalie, 1972), Erik Truffaz a fait appel à sa compagne Sandrine Bonnaire. Les amoureux aux regards complices et tendres nous ont offert un joli moment sur scène.
Vêtue d’une longue tunique blanche et de bottes turquoises, Camélia Jordana, dont le timbre chaud et voluptueux a conquis le public, nous a interprété « The Thrill Is Gone » puis « One Silver Dollar », que chantait Marilyn Monroe dans le western de 1954 Rivière sans retour avec Robert Mitchum.
Applaudissements à tout rompre, salle électrisée et rappel rythmé clôtureront cette belle soirée, sous le signe du jazz et du cinéma.
Visuel : (c) GE
Erik Truffaz
Rollin’ & Clap (Blue Note)
Festival Jazz de Saint-Germain-des-Prés
Théâtre de l’Odéon
Lundi 15 mai 2023