Polars
“Le Couteau” de Jo Nesbø : Harry Hole au fond du trou

“Le Couteau” de Jo Nesbø : Harry Hole au fond du trou

15 August 2019 | PAR Julien Coquet

Le retour de l’inspecteur Harry Hole s’accompagne du retour du terrible Svein “le Fiancé” Finne, un violeur en série récurent dans l’œuvre du maître du polar norvégien. Une descente aux enfers pour l’enquêteur norvégien le plus célèbre.

À chaque rentrée littéraire, l’amateur de polar se réjouit de retrouver Jo Nesbø, auteur de la série des enquêtes de l’inspecteur Harry Hole, traduite en près de cinquante langues et vendue à plus de quarante millions d’exemplaires au travers le monde. Après l’avoir quitté l’an dernier avec une relecture décevante (et bien trop longue) de Macbeth, Jo Nesbø nous propose une nouvelle aventure de l’inspecteur Harry Hole deux ans après La Soif. Un des personnages les plus intéressants de la littérature policière actuelle se retrouve en bien mauvaise posture et s’apprête à descendre un à un les cercles de l’enfer.

En premier lieu, Harry Hole est retombé dans l’alcoolisme, ce démon qui le guette et l’engloutit depuis le début de la série. Sa femme, Rakel, avait réussi à le sortir de cette spirale suicidaire. Mais Rakel l’a quitté… Sans même avoir le temps de se réconcilier avec elle, Harry est appelée par sa collègue Katrine qui lui apprend le meurtre, au couteau, de Rakel. Il est impossible alors pour Harry Hole d’enquêter sur le meurtre de celle qu’il aimait, lui-même étant considéré comme l’un des principaux suspects. Menant son enquête parallèle, au plus profond de la tristesse, l’inspecteur Hole s’intéresse à Svein Finne, ce violeur en série qu’il avait arrêté il y a une dizaine d’années et qui vient d’être libéré. Cet homme qui l’obsède aurait peut-être cherché à se venger de Harry, lui qui avait assassiné le fils de Svein au cours d’une de ses enquêtes…

Véritable roman de la descente aux enfers, Le Couteau est aussi un whodunit classique et riche en rebondissements, assez différent des thrillers centrés autour de tueurs en série comme Le Bonhomme de neige ou La Soif. Tout tourne autour d’une seule et même question: qui a tué Rakel Fauke et pourquoi ? Les fausses pistes se multiplient, les personnages se complexifient, les mobiles apparaissent et des intrigues secondaires naissent. Il y a donc peu de cadavres dans Le Couteau, mais la charge émotionnelle pour le lecteur n’en est pas moins grande, lui qui connaît le rôle que jouait Rakel pour Harry. Avec un final surprenant, Le Couteau est aussi un roman sur les syndromes post-traumatiques, les enjeux de pouvoir au sein de la police, le mal incarné et le besoin d’amour pour parvenir à s’aimer soi-même.

Harry avait été heureux; mais le bonheur, c’était comme l’héroïne, une fois qu’on y avait goûté, une fois qu’on en connaissait l’existence, on ne pouvait jamais accepter totalement la vie sans. Car le bonheur est autre chose que la satisfaction. Le bonheur n’est pas naturel. C’est un Etat d’urgence trépidant, ce sont des secondes, des minutes, des jours qu’on sait ne pas pouvoir durer; et le manque ne survient pas après, mais pendant. Avec le bonheur vient en effet la douloureuse notion que rien ne sera plus jamais pareil, et ce qu’on a nous manque déjà, on redoute la privation, la douleur de la perte, on se maudit de savoir ce qu’on est capable de ressentir.

Le Couteau, Jo Nesbø, Gallimard, Série noire, 608 pages, 22€

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