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Louis Crocq : Les paniques collectives

03 March 2013 | PAR Jean-Paul Fourmont

Psychiatre et professeur de psychologie à l’université de Paris V, Louis Crocq a créé les cellules d’urgence médico-psychologique au lendemain des attentats de la station de RER en 1995. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont Les traumatismes psychiques de guerre et 16 leçons sur le trauma. Il vient de rédiger Les paniques collectives, récemment paru aux éditions Odile Jacob.

« PEUR ENSEMBLE »

A l’ère des rassemblements de masse, le moindre danger risque d’être amplifié et de susciter un effroi qui dégénère, de proche en proche, en véritable panique collective. C’est pourquoi il est essentiel de dépasser la fascination morbide que suscitent les catastrophes pour comprendre ce phénomène de « peur ensemble ».

Il convient de se défier des récurrentes désignations de boucs émissaires. L’une des caractéristiques de la panique collective, c’est qu’elle accroit le désordordre social et multiplie les victimes. Il faut réduire ensemble l’impact de l’incident ou de la catastrophe.

LA CONNAISSANCE

Pour atteindre cet objectif, la démarche essentielle est celle de la connaissance : si chacun dispose du savoir sur ce que sont les émotions, sur les effets adaptatifs de son stress et sur ce qu’est la panique collective, alors les mécanismes de la panique collective ne pourront plus fonctionner de façon aussi tristement efficace que ça a été le cas jusqu’à présent. Tout un chacun doit être armé pour prévoir et neutraliser une panique, ainsi que le préconise l’auteur.

PANIQUE LORS D’INCENDIES DANS DES THÉÂTRES OU DANS DES LIEUX DE RASSEMBLEMENT

Lors de l’incendie du bazar de la Charité à Paris, le 4 mai 1897, le feu initié par la lampe à éther du cinématographe se propagea et embrasa tout le bazar. La panique gagna cette manifestation de charité, il y eut au final plus de 124 morts. Certains spirites avaient prévu cet incendie. Cet événement refléta l’atmosphère de fin de siècle, que les guerres assombrirent encore davantage.

PANIQUE CHEZ LES SOLDATS FRANÇAIS (ZOUAVES) SURPRIS PAR LA PREMIÈRE ATTAQUE DE GAZ A YPRES

Le 22 avril 1915, à Ypres en Belgique, eut lieu la première attaque au gaz chimique. Elle était le fait de l’armée du Reich wilhelmien. A cette occasion, des hommes tombèrent asphyxiés, ou bien en se tordant dans d’abominables spasmes et douleurs. Les victimes furent extrêmement nombreuses du côté de l’armée française. Ce qui causa, par la suite, de sévères paniques collectives dans les rangs des Alliés.

EXODE DE JUIN 1940 : LA FUITE DEVANT L’AVANCEE DE ARMEE ALLEMANDE

En juin 1940, l’exode avait certes été prévu par le gouvernement, mais il fut improvisé spontanément par quelques douze millions de personnes, qui se précipitèrent frénétiquement sur les routes, de peur de croiser la route de l’envahisseur venu d’outre-Rhin. L’auteur analyse avec force détails les ressorts de cette panique collective, de même que ceux des achats compulsifs de denrées alimentaires lors des peurs de pénurie.

L’ouvrage du professeur Louis Crocq est véritablement passionnant. Il recense certaines des grandes peurs de l’histoire, sans toutefois prétendre à un caractère exhaustif. L’une des solutions consiste à délivrer une information fiable au plus grand nombre : à partir du moment où l’homme pourra se délivrer des paniques par le déchiffrement des mystères de la nature, ou par les progrès de la civilisation, tout ira mieux. L’exercice de la sagesse est aussi un marchepied nécessaire à l’éducation des foules.

Louis Crocq, Les paniques collectives, Editions Odile Jacob, janvier 2013, 380 p., 27,9 euros.

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Jean-Paul Fourmont
Jean-Paul Fourmont est avocat (DEA de droit des affaires). Il se passionne pour la culture, les livres, les gens et l'humanité. Contact : [email protected]

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