Essais
« Les Cinq secrets de James Bond » d’Aliocha Wald Lasowski : Philoscopiquement vôtre

« Les Cinq secrets de James Bond » d’Aliocha Wald Lasowski : Philoscopiquement vôtre

23 August 2020 | PAR Julien Coquet

Porter un nouveau regard sur James Bond : telle est la mission de l’essayiste Aliocha Wald Lasowski.

James Bond appartient à la culture populaire. Chaque sortie d’un nouvel opus est attendu comme le messie. Et la sortie reportée de Mourir peut attendre fut aussi douloureuse que celle de Tenet de Christopher Nolan. Mais, à y regarder de plus près, la franchise des James Bond est plus profonde et intéressante que cela (« Pourquoi maintenir cette distinction, au sein des multiples créations, entre la qualité artistique du cinéma exigeant et la quantité des blockbusters mainstream ? »). Loin d’être un pur produit commercial, James Bond se présente finalement comme un personnage qui pense et agit selon un système de valeurs. Dans Les Cinq secrets de James Bond, Aliocha Wald Lasowski se propose d’analyser le plus célèbre des agents secrets, de James Bond contre Docteur No (1962) à Mourir peut attendre (2020).

Appréciés dans le monde entier, les films de la franchise reflètent un échiquier politique et diplomatique. De la Guerre froide aux nouvelles formes de terrorisme, les films de James Bond font la synthèse des conflits mondiaux. « Si l’œuvre de James Bond est appréciée par les spectateurs du monde entier, cela est dû au fait que sa dimension politique, à l’écran, apaise l’équilibre stratégique et adoucit le véritable échiquier diplomatique, dans le réel. » L’essayiste analyse aussi le rapport au monde de James Bond : ce dernier est-il plutôt Britannique ou bien citoyen du monde ? Dans les trois dernières parties de l’ouvrage, Aliocha Wald Lasowski s’intéresse au rapport aux femmes de James Bond, à la fonctionnalité du corps du héros et enfin aux références oscillant entre culture classique et pop culture disséminées dans les 25 opus.

L’intérêt de Les Cinq secrets de James Bond est de réaliser une parfaite synthèse des films pour en livrer des conclusions pertinentes. Si le nombre d’exemples pour démontrer chaque argument aurait gagné à être réduit, la technique de la philoscopie utilisée par l’essayiste se révèle originale, et parfois tirée par les cheveux. « En passant l’image-action au crible du détail, la réflexion philoscopique analyse l’énigme de la texture visuelle et offre une nouvelle dialectique du regard. Par une observation minutieuse des modulations infinitésimales du récit, le philoscope se glisse dans les jointures de la fiction d’espionnage ». Si l’introduction peut rebuter par sa complexité, la suite de l’ouvrage se révèle bien plus limpide et loin d’un jargon qui peut parfois effrayer. Au final, Les Cinq secrets de James Bond se présente comme un essai convaincant débouchant sur un effet excitant : revoir tous les films de James Bond d’un nouvel œil.

« Ainsi faut-il ici distinguer esthétique et politique. D’une part, dans l’œuvre de James Bond, l’esthétique visuelle et narrative évolue selon trois stades : le classicisme hitchcockien des années soixante incarné par Bons baisers de Russie, puis le style d’aventures des années quatre-vingt où cohabitent épique et fantaisie, comme Moonraker, après la tentative pop et psychédélique de Au service secret de Sa Majesté. Enfin, le retour au réalisme et symbolisme sombre de l’espionnage, à l’image de Skyfall en 2012 ou de Spectre en 2015. »

Les Cinq secrets de James Bond, Aliocha Wald Lasowski, Max Milo Editions, Voix libres, 256 pages, 19,90 €

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Julien Coquet

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