Marlène Dietrich 20 ans après…que reste-t-il de l’ange bleu ?
« Votre nom commence par une caresse et finit par un coup de cravache » : le portrait que fait Cocteau de la belle nordique est un peu celui que l’on retient d’elle aujourd’hui. Sous un vernis d’actrice à succès, sous le glamour d’un manteau en renard aussi blanc que sa peau, et qui fait ressortir des pommettes couleur lilas et des yeux bleu topaze, on découvre un portrait nuancé et complexe, où la froideur et la force ont côtoyé la beauté et la solitude.
De la femme fatale
Le côté angélique de Marlène Dietrich fut sa carte de visite et son laisser-passer : avec plus de cinquante films à son actif, feu l’actrice aurait eu de quoi faire rougir Marilyn. Mais dans un tout autre style : une version plutôt papier glacé du blond platine qui cachait mal son feu intérieur et son humanité. Au tableau de chasse, des hommes comme Josef von Sternberg, Joseph Kennedy, les acteurs John Wayne, Gary Cooper, et Jean Gabin, et même le jeune John Fitzgerald Kennedy. Ce visage d’ange a inspiré des réalisateurs tels que Fritz Lang (l’Ange des maudits), Hitchcock (Le Grand Alibi), Orson Welles (La Soif du Mal), Billy Wilder, Ernst Lubitsch et bien sûr celui qui la rendit bleue et célèbre, Sternberg. Leur collaboration passionnelle a donné le jour à une dizaine de films, dont les plus connus sont L’Ange bleu et Coeurs brûlés (Morocco). Le reste s’est enfoui sous la poussière des années : ne reste plus qu’une légende un peu jaunie, où le charisme et le visage d’ange portent encore ce mélange de sulfureux et d’angélique qui l’a rendit célèbre.
L’actrice rafle de nombreux prix et titres à l’époque : elle fut nommée par l’American Film Institute neuvième meilleure actrice de légende du cinéma, et se vit remettre la Légion d’honneur. Post mortem, le groupe de rock Noir Désir a composé une chanson en son honneur, Marlène, et son portrait apparaît aussi sur la pochette de l’album des Beatles, Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band.
à la faille fatale
C’est à partir des années 2000 que le portrait se complexifie, et qu’il commence à se rapprocher de celui de sa cousine américaine. À l’occasion du centenaire de sa naissance, le président de la République allemande lui rend hommage en 2001 à Berlin, et de nouvelles données entrent en compte : sa confidente et amie évoque l’idée que l’actrice se serait suicidée dans son appartement parisien, qu’elle occupait depuis 1980, et révèle que l’actrice lui avait commandité des somnifères le jour même de sa mort. Celle-ci avait toujours été entourée d’une nappe de mystère, car son corps n’avait pas fait l’objet d’une autopsie. Selon les dires de son ami Louis Bozon qui vient de publier Allo mon ange, c’est Marlène !, (mai 2012, Michel Lafon), la diva a achevé sa vie dans une grande solitude, invisible au grand public. Déchéance de l’ange ? Pas vraiment. Plutôt démystification d’une princesse.
Et ce qu’il en reste
Berlin est revenu sur ses positions contre la diva (qui s’était fortement opposée au régime nazi de l’époque) et lui a depuis dédie la place Marlene Dietrich dans le quartier de la Potsdamer Platz, à proximité du Musée du Film de Berlin. Si la mémoire collective reste marquée par ce visage dostoïevskien immortalisé par Sternberg, il est maintenant réservé à quelques happy few…
Finalement, de l’ange bleu, il ne reste peut-être plus que la couleur… Du bleu profond comme celui de ses yeux, troublants comme une mer de solitude, Marlène a séduit une époque et nous a légué le grand voile de tristesse qui recouvre l’azur de son regard. Celui d’une époque tumultueuse, et d’une femme qui ne s’est pas laissée corrompre.
Voir le site officiel dédié à Marlène Dietrich.
One thought on “Marlène Dietrich 20 ans après…que reste-t-il de l’ange bleu ?”
Commentaire(s)