Cinema
MAMAN ou la chanson douce d’Alexandra Leclère

MAMAN ou la chanson douce d’Alexandra Leclère

08 May 2012 | PAR Emma Letellier

Second long-métrage d’Alexandra Leclère, Maman est un film d’une étonnante tenue où crispation et émotion naissent des retrouvailles d’une mère avec ses filles.  Dans un espace temps très resserré, le spectateur se trouve rapidement pris dans un huis clos familial où l’enfer c’est les autres mais aussi soi-même, mère et filles s’opposant de confondantes réflexions.

Près de 20 ans après avoir fui le foyer maternel, Alice et Sandrine sont contraintes d’accueillir leur mère. Abandonnée par son compagnon, cette corpulente acariâtre, fausse blonde et fausse bourgeoise, imper léopard et chaines en or  s’impose comme une évidence dans la vie que ses filles sont parvenues à construire tant bien que mal sans son soutien.  Josiane Balasko figure une mère abjecte, retranchée dans une profonde solitude, barricadée derrière des décennies de silence et d’incompréhension, incapable du moindre geste tendre et affectueux. Pour le spectateur, c’est le portrait d’une vie gâchée, engloutie par l’impossible échange et les crispations. Comment retrouver le dialogue, comment faire circuler à nouveau la parole entre des êtres cloisonnés dans leur silence ?

La mère et les deux filles évoquent ainsi des êtres emmurés, incapables de sortir de leur propre prison, le sentiment de culpabilité bridant toute action, et empêchant la prétention à une quelconque légitimité. Maman devient alors la projection d’un monde ennemi où tout est angoisse, d’un monde sans confiance et sans amour parce que le plus attendu n’était pas au rendez-vous. Marina Foïs joue ainsi les timides, version aplatie de la fille malaimée, quand Mathilde Seigner, la sœur aînée, incarne la paroi glissante, la fille force et résistance, incapable du moindre sentiment amoureux et du moindre attachement.

Un joli parcours entre des personnages admirablement interprétés. De la force. Une formidable attention portée aux trajectoires intérieures des caractères. Un portrait plus qu’un récit, mais un portrait saisissant.

 

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Emma Letellier

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