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[Compétition] Dans « La Forêt des songes », Gus van Sant s’abîme dans la lourdeur

[Compétition] Dans « La Forêt des songes », Gus van Sant s’abîme dans la lourdeur

16 May 2015 | PAR Geoffrey Nabavian

Il est déjà le maudit de cette édition. On ne fera pas ici que lui jeter des pierres, car il ne le mérite pas. Si on comprend où il veut aller, force est cependant de reconnaître que La Forêt des songes, film raté s’il en est, reste quasiment tout du long d’une lourdeur sidérante.

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Est-ce la faute aux genres et à leur mélange ? On le voit bien : avec ce nouveau film, Gus van Sant a voulu essayer quelque chose. Mais le résultat final ne fonctionne pas. Ni le volet mélo, ni l’onirisme, ni l’humour qu’on perçoit ça et là, ne produisent d’effet satisfaisant. L’homme paumé, à deux doigts de sombrer, joué, pas mal, par Matthew McConaughey, nous ennuie d’emblée. Enfin, pas tout le temps. Et comme on sait déjà que cette Forêt des songes va se prendre plein de bois vert à Cannes, on veut en tirer le positif. Car oui, le film contient des scènes réussies. Les premiers retours dans le temps, où notre homme en crise dialogue avec sa femme, sont beaux, captés en scènes longues, tenues, parfois à la limite du vénéneux. Et la toujours splendide Naomi Watts nous aide à les goûter.

Las, tout se gâte dès qu’on revient dans la forêt. Car oui, Matthew, d’emblée, part au Japon. Pour aller se tuer dans la « Mer d’arbres », une gigantesque forêt, refuge des suicidaires du monde entier. Dès qu’il y pénètre, on cesse de comprendre les partis-pris. Pourquoi Gus van Sant semble-t-il se caricaturer lui-même, lorsqu’il filme un suicide douloureux aux pilules ? pourquoi n’a-t-il pas l’air de croire à son histoire ? pourquoi l’apparition de Ken Watanabe en mystérieux homme perdu, désirant sortir de la forêt, fait-elle redouter d’emblée la suite du scénario ? pourquoi trouve-t-on les comportements des personnages absurdes ? et pourquoi cette musique, mais cette musique… horrible ? désamorçant tous les enjeux ?

On peut en venir à se dire que ce film constitue peut-être une tentative de notre cinéaste dans la comédie burlesque… Ratée, quoi qu’il en soit, car on ne rit pas. On est gênés. Et inutile de dire que l’émotion ne pointe que rarement le bout de son nez. Rarement. Dans La Forêt des songes, tout n’est donc pas à jeter. Car il s’agit d’un film de Gus van Sant. En grande partie raté, mais tout de même. Son fond aurait pu tenir la route, sa forme, résultat d’une prise de risque, ne suit pas. Vraiment pas de quoi crier au déshonneur.

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La Forêt des songes, un film de Gus van Sant. Avec Matthew McConaughey, Ken Watanabe, Naomi Watts, James Saito, Katie Aselton, Jordan Gavaris. Musique : Danny Elfman. Durée : 1h50. Sortie le 9 septembre 2015.

Visuels : © SND

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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