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Gus van Sant artiste tout terrain à La Cinémathèque française

Gus van Sant artiste tout terrain à La Cinémathèque française

12 April 2016 | PAR Yaël Hirsch

C’est en la présence de Gus van Sant que s’est ouverte ce lundi 11 avril 2016 l’exposition et la rétrospective intégrale que la Cinémathèque Française lui dédie. La rencontre avec la presse s’est faite sous le signe de la simplicité authentique et l’exposition a dévoilé une scénographie très travaillée et une double entrée dans l’univers du réalisateur de Elephant (2003) : à travers ses nombreux violons d’Ingres et aussi par le biais des icônes qui l’ont (ou pas) habité (Burroughs, Milk, Cobain aussi bien que Depp, Kidman et Daniel Day Lewis).

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Joliment calligraphiées, autour d’une salle sombre où passent ses films, les diverses sections de l’exposition Gus Van Sant permettent de se promener dans les divers arts du cinéaste. Photographe renommé, il a expérimenté le découpage et le collage surréalistes dans ses Cut-Ups qui démarrent le parcours sur du noir et blanc étrangement inquiétant (et parfaitement esthétique). Une niche intérieure est aménagée où l’on retrouve l’origine de ces œuvres : des polaroids amassés durant des années. Certains portraits très naturels d’acteurs (Johnny Depp, Daniel Day Lewis) sont agrandis. La deuxième section de l’exposition tresse des fils d’influences qui  vont de William Burroughs à Ed Ruscha en passant par des auteurs et plasticiens moins connus comme Ken Keysey et Brion  Gysin.

La troisième salle fait le point sur l’art de l’aquarelle et du dessin de celui qui a été récemment exposé à la prestigieuse galerie Gagosian. Les premiers dessins sont très inspirés, religieux et parfois iconiques (Kidman en quasi-madone) pour le réalisateur de Promised Land (2012) qui a expliqué une partie de l’échec commercial de son remake de Psycho par le fait que Hitchcock était catholique alors que sa propre vision du monde était épiscopalienne. L’art de la couleur détourne parfois le portrait pour entrer dans la topographie et les dessins préparatoires des mouvements des personnages dans Elephant, aussi bien que la sensation de la ville d’adoption de Gus van Sant : Portland, Oregon.

On entre enfin dans un troisième univers du cinéaste : la musique, à travers un chambre obscure où passent certains clips qu’il a réalisé. Alors que cet enfant des années 1950 a avoué en conférence de presse avoir été marqué par des allers retours entre “le rock british et le blues américain”, citant avant tout Led Zeppelin et Frank Zappa, au moment où nous passons dans la boîte à musique, ce sont plutôt les sons harmonisés avec ses films des années 1990 qui sont à l’honneur : le Kurt Cobain mythifié de Last Days, les Red Hot chilli Pepper et la kitchissime scène d’autostop d’Uma Thurman sur fond bluegrass d’époque dans Even cowgrils get the blues (1993).

Après la visite de l’exposition, presse, direction de la cinémathèque et presse, se sont réunis vers 11h dans la grande salle de la cinémathèque pour une heure de questions et réponses quasi-religieuses. Réfléchi, présent et très calme, le réalisateur a répondu avec attention à chacune des questions abordant des sujets aussi divers que ses influences, l’interaction des arts qu’il pratique, ou  sa tentative de remake d’une grand classique du cinéma qu’il a vécue comme lutte intime contre une industrie hollywoodienne fanatique de prequels, sequels et reboots où seul de casting compte.

Il a aussi parlé de la diversité des thèmes abordés dans son oeuvre,  avec certaines icônes comme le leader des droits des gays à San Francisco, Harvey Milk, qui se sont imposées à lui plus par le scénario que par le thème  : “Je ne suis pas toujours dictateur, parfois, je me mets au service du scénariste“. Il a aussi calmement fait un  état des lieux des conditions de production du cinéma indépendant américain, qui sont à l’entendre, pas si préoccupantes que cela, puisque le coût de ce genre de cinéma n’a pas augmenté et a son public, là où les budgets des blockbusters ont explosé.

La rétrospective intégrale compte une vingtaine de films à voir à la cinémathèque du 13 avril au 28 mai 2016. Et le réalisateur a aussi eu une carte blanche d’une dizaine de films où l’on peut voir les œuvres de figures importantes pour lui comme Bela Tarr, Wong Kar Wai, Terence Malick ou Chantal Ackerman.

En ligne sur le site de la cinémathèque, “La galaxie de Gus van Sant” permet de mieux comprendre ses réseaux d’influences (à partir du 30 avril 2016) et  il signe le catalogue de son exposition co-édité avec Actes Sud ce jeudi 14 avril 2016 à la librairie de la Cinémathèque. Enfin, last but not least, ne manquez pas les thématiques spéciales Portland développées par la cafétéria  Les 400 coups.

 

visuels : Yaël Hirsch

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Bastien Stisi
Journaliste musique. Contact : [email protected] / www.twitter.com/BastienStisi

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