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[Cannes 2021, Hors Compétition] Oranges sanguines, et sa maîtrise corrosive

[Cannes 2021, Hors Compétition] Oranges sanguines, et sa maîtrise corrosive

04 August 2021 | PAR Geoffrey Nabavian

Ce nouveau long-métrage réalisé par Jean-Christophe Meurisse donne à vivre une suite de saynètes atteignant à l’acidité, porteuses d’un bien beau naturel et jouées par de magnifiques acteurs.

En France, de nos jours, un ministre bat des records d’hypocrisie, de perversité, de malhonnêteté et de ton mielleux : il va se faire drôlement corriger. L’extraordinaire Christophe Paou incarne cet homme monstrueux avec une force incroyable, un jeu physique fou, et un charisme démoniaque dans tous les sens de l’expression. Parallèlement à cette affaire, un couple de vieux retraités très endettés a trouvé la solution à ses problèmes : gagner un concours de rock dont le premier prix est une voiture. Olivier Saladin, aérien plus que de raison, et Lorella Cravotta, à la toute aussi belle fantaisie, endossent les costumes de ces figures attachantes et un peu folles avec humanité. Et en prime, par-dessus tout ce petit monde qui s’active, une jeune adolescente (Lilith Grasmug) désire se faire déflorer, mais va croiser tout autre chose sur sa route hélas.

Composé de saynètes au ton très acide prenant appui sur des sujets sérieux et sociaux pour s’élever jusqu’à la folie, Oranges sanguines est le nouveau long-métrage réalisé par Jean-Christophe Meurisse, meneur de la troupe de théâtre adepte des performances corrosives Les Chiens de Navarre. Présentée au Festival de Cannes 2021 Hors Compétition dans le cadre d’une Séance de minuit destinée à mettre en valeur toute son acidité au cœur de la quinzaine célébrant le cinéma, sa nouvelle œuvre filmique éblouit en premier lieu, donc, par ses actrices et acteurs, techniquement exceptionnels et se donnant à fond pour épouser la démence du ton et l’aider à grossir jusqu’à l’éclate et l’éclatement.

Mais les scènes du film demeurent également porteuses d’une denrée rare : loin d’arborer un côté rentre-dedans figé, elles apparaissent remplies de vie. Comme si elles portaient les traces d’improvisations ayant abouti à ce résultat final offert aux spectateurs. En conséquence, les figures données à suivre, loin de ressembler à de simples pantins provocateurs, gardent un côté terriblement humain, et souvent surprenant. Et le film, en laissant durer longuement certaines de ses scènes, paraît semé d’heureux incidents étonnants. On s’y engouffre donc à la suite du personnage faisant ici un peu office de guide naïf, le fils politicien du couple danseur, joué par Alexandre Steiger, qui éblouit notamment face à son frère – le si naturel et déjanté Anthony Paliotti – dans une séquence de dîner d’anniversaire familial offrant au final un marais de sables mouvants hilarant.

Oranges sanguines est présenté au Festival de Cannes 2021 Hors Compétition lors d’une Séance de minuit. Il sortira dans les salles de cinéma françaises le 13 octobre, distribué par The Jokers.

Retrouvez tous nos articles sur les films du Festival dans notre dossier Cannes 2021.

Visuel : © The Jokers

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Geoffrey Nabavian
Parallèlement à ses études littéraires : prépa Lettres (hypokhâgne et khâgne) / Master 2 de Littératures françaises à Paris IV-Sorbonne, avec Mention Bien, Geoffrey Nabavian a suivi des formations dans la culture et l’art. Quatre ans de formation de comédien (Conservatoires, Cours Florent, stages avec Célie Pauthe, François Verret, Stanislas Nordey, Sandrine Lanno) ; stage avec Geneviève Dichamp et le Théâtre A. Dumas de Saint-Germain (rédacteur, aide programmation et relations extérieures) ; stage avec la compagnie théâtrale Ultima Chamada (Paris) : assistant mise en scène (Pour un oui ou pour un non, création 2013), chargé de communication et de production internationale. Il a rédigé deux mémoires, l'un sur la violence des spectacles à succès lors des Festivals d'Avignon 2010 à 2012, l'autre sur les adaptations anti-cinématographiques de textes littéraires français tournées par Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. Il écrit désormais comme journaliste sur le théâtre contemporain et le cinéma, avec un goût pour faire découvrir des artistes moins connus du grand public. A ce titre, il couvre les festivals de Cannes, d'Avignon, et aussi l'Etrange Festival, les Francophonies en Limousin, l'Arras Film Festival. CONTACT : [email protected] / https://twitter.com/geoffreynabavia

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