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“Un Homme d’Etat”, une plongée en eau trouble réaliste dans les moeurs du pouvoir

“Un Homme d’Etat”, une plongée en eau trouble réaliste dans les moeurs du pouvoir

29 January 2015 | PAR La Rédaction

Cette fiction ne va pas bouleverser le film de genre politique. Elle ne verse pas dans la révélation. Mais son intrigue offre une description crédible des petits arrangements entre “ennemis” le temps d’une campagne présidentielle.

[rating=3]

Un président de la République au plus bas dans les sondages est prêt à tout pour assurer sa réélection. A trois semaines du 1er tour, ses conseillers se démènent en coulisses pour rallier le soutien d’une grande figure de l’opposition et changer la donne dans l’opinion… Les jeux de pouvoir et les dessous des campagnes électorales offrent une matière inépuisable au cinéma français.

Après La Conquête (2011) retraçant l’irrésistible ascension de Nicolas Sarkozy au sommet de l’exécutif, puis le formidable L’Exercice de l’Etat (2012) qui donnait à voir une machine implacable dévorant les hommes qui la servent, la fable politique s’enrichit d’un nouveau chapitre sur ce monde sans pitié et aux repères mouvants avec Un Homme d’Etat de Pierre Courrège. Ici, il est d’abord et surtout question de valeurs, d’éthique. Et du combat frontal qui oppose ambitions personnelles dévorantes et convictions, carriérisme et idéaux. Deux inclinaisons a priori incompatibles, voir irréconciliables. Mais l’avidité balaie tout sur son passage, y compris les états d’âme.

Jean-François Vanier (Patrick Braoudé) est un président aux abois, qui a perdu de vue le sens de l’intérêt général. Distancé dans les intentions de vote, ce chef de file de la droite républicaine est disposé à frayer avec un parti d’extrême droite avant finalement d’opter pour un mariage contre nature avec un “vieux lion” de la gauche Robert Bergman, campé par l’impeccable Pierre Santini. Manœuvres politiciennes, instrumentalisation, pragmatisme, bluff et renoncements sont à l’œuvre dans ce long-métrage transformé en partie d’échecs où chacun des protagonistes avancent ses pions, soufflant le chaud et le froid, pour tenter d’arriver à ses fins. Dans les alcôves du QG de campagne, sous les ors de l’Élysée ou lors des tractations secrètes menées en province, le cinéaste saisit les contradictions de l’exercice du pouvoir ainsi que l’ambivalence des hommes et des femmes qui aspirent à ses plus hautes fonctions.

Pierre Courrège réussit à éviter l’écueil de la caricature tout en montrant que dans cette jungle où tous les coups sont permis, même les plus “droits”, les plus “purs” finissent par avoir recours au cynisme et à la manipulation. Si son récit pêche trop souvent par manque de rythme et en particulier l’absence d’un sentiment d’urgence alors que la course contre la montre électorale est engagée, il peut s’appuyer sur des dialogues ciselés et mordants qui font mouche. Des dialogues signés François Bégaudeau, l’auteur d’Entre les murs, qui culminent lors du face-à-face entre Vanier et Bergman, deux fauves qui ne sont pas du même bord, qui ne s’estiment pas, et semblent pourtant enclins à faire alliance croit-on… “Un homme d’Etat”, une fable politique de Pierre Courrège, co-écrite par François Bégaudeau, avec Pierre Santini, Patrick Braoudé, Samia Dahmane, Bruno Solo et Jean Benguigui, durée 1h30, sortie prochainement en 2015 Encadré : Une projection à l’Hôtel de Ville Après une toute première projection publique au printemps dernier donnée devant un parterre de figurants, à Auch, dans le Gers, où le film a été tourné courant 2011, “Un Homme d’Etat” a été présenté en avant-première lundi 26 janvier dans l’Auditorium de l’Hôtel de Ville de Paris. Toute l’équipe du film était réunie autour du réalisateur et des producteurs pour dévoiler cette fiction retenue au Festival des Films du Monde à Montréal en décembre dernier. Si Anne Hidalgo s’était faite excuser, son adjointe Antoinette Guhl, le conseiller de Paris Yves Contassot, et les élues Alicia Benêt et Francine Bavay avaient fait le déplacement comme le journaliste Paul Amar et le comédien Pascal Légitimus pour défendre le film.

https://www.youtube.com/watch?v=46UjQ_sqW4c

Un homme d’Etat, texte de François Begaudeau et film de Pierre Courrège, avec : Bruno Solo, Pierre Santini, Patrick Braoude, 1h32.

Renaud Moncla.

visuels : photos officielles du film

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La Rédaction

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