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Festival de Gérardmer 2023 : Journée du 28 janvier 2023 : Un voyeur, des courts et du cinéma espagnol

Festival de Gérardmer 2023 : Journée du 28 janvier 2023 : Un voyeur, des courts et du cinéma espagnol

30 January 2023 | PAR Julien Coquet

L’avant dernière-journée du Festival ne nous a pas convaincus, si ce n’est la compétition de courts-métrages.

Troisième et dernière réalisatrice à présenter son film en compétition à cette 30ème édition, Chloé Okuno nous propose son premier long-métrage, Watcher (prix spécial du 30ème anniversaire du Festival), pour la séance de 11h. On y suit Julia, américaine, fraichement arrivée à Bucarest où son mari vient d’être muté. Les deux s’aiment mais les journées sont longues : entre déambulation urbaine et apprentissage du roumain, les journées de Julia, sans emploi, n’échappent pas à l’ennui. Ce dernier se transforme en angoisse lorsqu’elle prend conscience qu’une silhouette masculine semble la scruter depuis l’immeuble d’en face, d’autant plus qu’un tueur en série, l’Araignée, sévit. Hommage appuyé à Hitchcock (Fenêtre sur cour, blondeur typiquement hitchcockienne de l’actrice principale Maika Monroe…), Watcher démontre la maîtrise formelle des codes du thriller par Chloé Okuno. Watcher s’inscrit habilement dans la lignée des films « je ne suis pas folle vous savez » et dans une vision post #MeToo intelligente. Toutefois, le film semble trop étiré, et ne parvient pas à trouver de rythme, suscitant un ennui poli. Reste un film maîtrisé mais un peu trop lisse pour vraiment se distinguer.

La compétition des courts métrages nous a plus réjouis, moment fort du Festival pour découvrir les talents émergents. La diversité des cinq courts présentés prouve la vivacité du genre. Growing d’Agata Wieczvorek propose une vision contemplative de la question très politique de l’avortement en Pologne, bien servi par une belle photographie. Il y a beaucoup de lumière ici (grand prix du court métrage) de Gonzague Legout rend un hommage appuyé à Fellini et Chaplin, en seulement quatre minutes. Plus inventif, La Machine d’Alex de Maël Le Mée, nous a rappelé le cinéma de Ducournau et de Cronenberg. Dans un futur proche, Alex travaille sur une machine mêlant chair artificielle et mécanique. Un long métrage devrait être tourné cet été, à suivre donc. Antonin Peretjatko a ensuite réveillé la salle par les rires qu’il a provoqués. Les Algues maléfiques navigue entre comique de situation très à-propos et blagues lourdingues sur les végans et le « wokisme ». Réalisé par un collectif indépendant issu du monde des effets spéciaux, Les Racines sauvages, micro-fable écologique, suit un chasseur enquêtant sur la mort d’un de ses collègues.

Les hostilités reprennent peu avant 20h. L’heure est à la célébration : le Festival International du Film fantastique fête ses 30 ans ! Les cinémas coréens et espagnols, grands pourvoyeurs de films titrés dans l’histoire du festival, sont mis à l’honneur. Images d’archives et messages vidéos se succèdent avant une belle photo de famille regroupant réalisateurs importants (Kim Jee-woon, Álex de la Iglesiaet Jaume Balagueró) et membres du jury. Puis vient la projection de Venus, film tant attendu du réalisateur de Rec. Lucia (Ester Expósito), danseuse dans une boîte de nuit, dérobe de la drogue à ses employeurs mais est prise sur le fait. Traquée et réfugiée chez sa sœur dans la tour Vénus, elle devra faire face à une menace bien plus terrifiante. Venus prend de multiples directions : film de gangster, sorcellerie, références aux sorcières d’Argento, second degré assumé, etc. A courir plusieurs lièvres, on n’en attrapera aucun. Le film se révèle poussif et grand-guignolesque sur la fin, mais n’intéresse pas non plus avant. On peut comprendre que le second degré soit assumé, mais ce n’est pas pour autant que le mixage sonore doit être assourdissant, ni même que la final girl ressuscite de nulle part. Un film qui nous a fortement irrités.

C’était sans compter un autre film irritant : The Communion girl de Víctor García. Attention pour le pitch, vous l’avez déjà vu dans dix autres films : deux amies, en revenant de boîte, croisent une petite fille habillée en tenue de première communiante. Mais la petite perdue de vue, seule une poupée subsiste, poupée que les deux copines décident de ramener. On attendait peu d’un homme qui a réalisé Hellraiser : Revelations et Mirrors 2, mais, le film étant sélectionné à Gérardmer (hors compétition Dieu merci), nous étions tout de même un peu curieux. Las, le film est un pur produit de ce que la série Conjuring a pu donner de pires : jump scares à gogos, enquête pour retrouver l’origine du mal, poupée maléfique… Si la reconstitution de l’Espagne des années 1990 peut amuser, on se demande vraiment si les discothèques diffusaient de la techno et si les jeunes portaient déjà des slims. Quelle fatigue, cette dernière séance.

Watcher de Chloé OKUNO, Etats-Unis, 2022, 1h36
Venus de Jaume BALAGUERO, Espagne, 2022, 1h40
The Communion girl de Víctor GARCÍA, Espagne, 2022, 1h39

Visuel : Extrait du film Watcher de Chloé OKUNO

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