Dark Shadows: Tim Burton et Johnny Depp en pilotage automatique mineur
Critique. On espérait la renaissance du duo le plus prolifique de ces 20 dernières années mais Dark Shadows confirme le récent manque d’inspiration de Tim Burton et de Johnny Depp. Un film bien moins funky qu’annoncé, bavard et ressassant les obsessions traditionnelles de l’auteur. Une déception.
Synopsis: En 1752, Joshua et Naomi Collins quittent Liverpool, en Angleterre, pour prendre la mer avec leur jeune fils Barnabas, et commencer une nouvelle vie en Amérique. Mais même un océan ne parvient pas à les éloigner de la terrible malédiction qui s’est abattue sur leur famille. Vingt années passent et Barnabas a le monde à ses pieds, ou du moins la ville de Collinsport, dans le Maine. Riche et puissant, c’est un séducteur invétéré… jusqu’à ce qu’il commette la grave erreur de briser le cœur d’Angelique Bouchard. C’est une sorcière, dans tous les sens du terme, qui lui jette un sort bien plus maléfique que la mort : celui d’être transformé en vampire et enterré vivant. Deux siècles plus tard, Barnabas est libéré de sa tombe par inadvertance et débarque en 1972 dans un monde totalement transformé…
Voilà maintenant plus de 20 ans que la paire Depp/Burton s’est réunie. Souvent pour le meilleur mais aussi pour le pire (Charlie et la chocolaterie). Et en se caricaturant de plus en plus. Johnny (même sans Tim) a du mal à sortir des rôles de marionnettes grimaçantes et grimées. Tim peine à retrouver la magie poétique et le merveilleux des Big Fish et autres Edward aux mains d’argent. La bande-annonce de leur nouvel opus laissait espérer un vent de fraicheur et de malice permettant d’alléger un univers boursouflé. Mais Dark Shadows n’est au final qu’un patchwork brouillon de ce que Burton a pu faire dans le passé.
Des décors sombres, une ambiance gothique à souhait, des manoirs hantés, des contes fantastiques et des histoires de fantôme ; qui n’étonnent plus personne. La magie n’opère quasiment plus et le sentiment de redite domine, notamment durant l’interminable première demi-heure et sa tentative d’amener le film vers le genre horrifique en costume. Enseveli sous les lourdeurs baroques d’un cinéaste qui a oublié son âme d’enfant, Dark Shadows n’exploite que trop peu les possibilités ludiques de son scénario, qui aurait pu jouer à fond sur l’opposition de couleurs entre les excentriques seventies et la noirceur Burtonienne. Certaines scènes laissent entrevoir ce mélange détonnant et jouissif entre deux univers antagonistes, qui aurait pu apporter un peu de peps au film. Un bal endiablé où le manoir se transforme en boite de nuit et surtout une scène d’amour surréaliste entre violence et folie sur fond de Barry White.
Mais l’univers des années 70 n’est finalement qu’un gadget, trop peu exploité. Un prétexte pour nous resservir les éternelles obsessions du cinéaste et un énième rôle outrancier pour Johnny Depp. Une histoire racontée 100 fois où un incompris rejeté par les autres, victime de son destin, qui cherche sa rédemption parmi la société. La bataille finale impose un certain panache mais le rythme ronronnant du long métrage empêche une réelle adhésion aux maigres enjeux du script. On notera quand même de très bons choix musicaux et le plaisir de voir Michelle Pfeiffer saisissante en mater familias de fer dont la classe évidente contraste avec le reste du film. Du cinéma correctement fabriqué mais manquant cruellement d’originalité. Et surtout de plaisir.
Gilles Hérail
Dark Shadows, un film de Tim Burton avec Johnny Depp, Eva Green, Chloé Moretz, Michelle Pfieffer, 1h52, sortie le 9 mai 2012
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