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<em>Hey! modern art & pop culture</em> à la Halle Saint-Pierre : quand l’art brut fait place à la culture urbaine

Hey! modern art & pop culture à la Halle Saint-Pierre : quand l’art brut fait place à la culture urbaine

16 September 2011 | PAR Justine Hallard

Après une magnifique saison dédiée à l’art brut japonais puis à la collection allemande au doux nom de Sous le vent de l’art brut de Charlotte Zander, la Halle Saint-Pierre continue son incursion auprès des artistes alternatifs. Cette fois-ci l’invitation a été lancée à la revue Hey ! modern art & pop culture, pour une exposition éponyme. Une expo où pop culture et culture populaire doivent s’y rencontrer.

L’idée de cette collaboration tout à fait sympathique a pour objet commun celui de promouvoir des artistes « pas tout à fait comme les autres », en tout cas en marge des codes connus et reconnus de l’Art avec un grand A. L’exposition se veut être la passerelle de ces artistes inspirés du Lowbrow art, gavés de culture urbaine, de comics et de gore, à ceux discrets et même souvent anonymes des arts bruts et singuliers si chers à Dubuffet, qui les portera aux nues et donnera naissance au concept-même d’art brut. Cet art des autodidactes, en marge de toute démarche culturelle, en état de création purement personnelle et sans influence, ne se souciant aucunement de reconnaissance ni de l’avis de quiconque.

Long travail de quelques passionnés d’art brut pour enfin donner une identité à cet acte de création où l’âme de ces créateurs rime avec tiraillement, répétition et obsession autour de leur sujet, où les portes de l’hôpital psychiatrique et le vagabondage ne sont jamais très loin.

Ainsi le lien entre artistes bruts et artistes urbains ou du Lowbrow semble bien ténu.

Bien que l’art brut commence tout juste à émerger comme une catégorie à part entière dans l’histoire de l’art et à prendre ses lettres de noblesse auprès des institutions, cet art « à part » reste cependant réellement marginal. Les artistes du Lowbrow art en revanche ont déjà mis les deux pieds dans la Reconnaissance puisque beaucoup d’entre eux sont issus d’une culture Pop Art (plus que reconnue !) et beaucoup d’autres de la scène underground, qui est  plus que tendance.

Les artistes-mêmes semblent aussi au final vivre sur des planètes différentes. Tandis que les créateurs de l’art brut sont en majorité des autodidactes évoluant dans des contextes sociaux difficiles, ceux du Lowbrow sont en partie bardés de diplômes et proche de l’art contemporain bien qu’ils cherchent à s’en détacher. Ils en sont pourtant l’expression sous sa forme populaire.

Là où l’art brut peint avec ses tripes sans considération réelle pour la question de l’esthétisme, les artistes Lowbrow sont majoritairement des illustrateurs avec une forte culture graphique et pour beaucoup sous le charme de l’esthétisme des super héros ou encore du tatouage, avec une affirmation réelle en ce sens quitte à ce que ce soit celle du kitsch, et même du gore. Une large partie des artistes ici représentés prennent d’ailleurs le contrepied du côté happy du Lowbrow pour plonger dans le noir le plus total où les squelettes pullulent comme des Vanités des temps modernes.

Enfin, si la pop culture est un courant, certes inspiré d’iconographies du quotidien mais d’une époque donnée (des comics des années 70 à la culture numérique d’aujourd’hui, en passant par le hardcore), la culture populaire dont sont issus les artistes bruts et singuliers, est quant à elle autrement plus vaste et sans marqueurs historiques, une culture où le macramé aurait aussi sa place (c’est déjà beaucoup moins tendance).

Difficile rencontre donc. Au point que seuls quelques artistes bruts et singuliers s’affichent au milieu des 60 artistes exposés. On retrouvera ainsi un peu esseulé Henry Darger pour le plus connu aux côtés d’outsiders comme Jean Tourlonias ou Alphonse-Eugène Courson.

Bien que le point commun de ces artistes soit celui d’être libre de créer ce que bon leur semble, pourquoi vouloir à tout prix leur donner un genre commun et forcer le rapprochement ?

Ces artistes urbains ou issus du Lowbrow méritaient bien en effet une invitation, et même une exposition rien qu’à eux, sans chercher à justifier leur place dans les murs de la Halle Saint Pierre, certes figure incontournable de l’art brut, mais aussi, tout simplement, de l’ouverture d’esprit à toutes les formes d’art, qui peut à elle seule justifier toutes cartes blanches.

 

 

 

 

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Justine Hallard

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