
Lyon aussi est Charlie
Si les drapeaux sont bel et bien en berne, les stylos, eux, sont levés et rendent comme ils peuvent hommage aux victimes et à ce qu’ils représentaient : la liberté. L’encre est peut-être noire, mais elle coule à flot pour répandre les couleurs de ce que l’on a voulu nous ôter. Aucun de nous n’est plus à genoux aujourd’hui, et il semblerait que les lieux culturels souhaitent porter encore plus haut l’art et la liberté d’expression.
Presque un mois jour pour jour après les avoir rangées, Lyon a tristement ressorti ses lumières hier soir dans le mouvement de soutien qui a réuni le monde entier autour de Charlie Hebdo ; elles furent déposées sur les marches place des Terreaux et parfois aux fenêtres de certains habitants, opposant ainsi nos lumières à un obscurantisme dévastateur.
Près de 10 000 personnes se sont retrouvées sur cette place, sous le regard de la France incarnée par la Fontaine Bartholdi et non sous celui du roi Louis XIV place Bellecour pourtant plus grande. L’instinct des lyonnais s’est donc tout de suite tourné vers la République et la Démocratie, elles aussi visées à travers cette attaque barbare. Si la foule n’est plus là aujourd’hui, on peut encore trouver la trace de son soutien dans cette affiche « Je suis Charlie » au pied de laquelle brûlent encore quelques bougies en haut des marches du palais de l’hôtel de ville.
Ainsi que le soulignent certains (à commencer par Jérôme Deschamps), parmi les victimes se trouvaient de véritables artistes. Comme l’ensemble de la nation, le monde culturel rend donc tout naturellement hommage à Charlie Hebdo, avec le sentiment d’avoir perdu des membres de la famille. Le personnel du musée des Beaux Arts de Lyon, situé justement place des Terreaux, a décidé de montrer son soutien par le port de badge pour certains, ou encore avec le placement d’affiches et d’une bougie à l’accueil administratif :
Il en est de même à l’accueil de l’Opéra où l’on peut également voir deux pancartes « Je suis Charlie ». Ce dernier a décidé d’afficher en plus une bannière sur son site durant les trois jours de deuil national et les membres du personnel rattachés à la ville de Lyon ont été invités par Gérard Collomb à observer une minute de silence, tandis que leurs collègues recevaient une lettre interne et pouvaient faire de même. Nombreux sont ceux qui, à titre personnel, ont d’ailleurs rejoint la place des Terreaux hier soir.
Le Théâtre des Célestins ne cache pas non plus son soutien avec ce même message à l’entrée de sa billetterie et la très probable préparation d’une newsletter en plus d’un lien présent sur leur site.
« Je suis Charlie » se lit donc partout en ville, jusque sur les vitrines d’une agence de voyage rue de la République, et le soutien du monde culturel rejoint celui du monde politique et surtout de la population lyonnaise. On sentait aujourd’hui encore dans les rues comme un sentiment de « cassure » : chacun vague à ses occupations, mais le choc d’hier est toujours perceptible, comme partout en France. Face à la douleur et à la consternation d’un tel drame les frontières s’estompent entre les régions ou même les pays ; dans cette union fraternelle née d’un acte barbare les lyonnais sont avant tout français et humains dans leur recueillement commun. Le message est simple, ici comme ailleurs : « Je suis Charlie », et je ferai tout pour le rester.
texte et photos (c) Elodie Martinez