Nuits Sonores : jour et nuit, la fête sous toutes ces facettes
Le festival des musiques électroniques retrouvait son ampleur normale durant la semaine de l’Ascension à Lyon. Avec des sites parfois complets avant l’ouverture.
Retour enfin aux anciennes usines Fagor et à la Sucrière ! Car si les organisateurs avaient pris soin de caler une édition 2021 en juillet pour éviter deux années blanches, l’Ascension électro des Nuits Sonores n’avait pas retrouvé son ampleur depuis 2019, Covid-19 oblige.
Cinq jours et quatre nuits d’un rendez-vous majeur pour ce Sonar français à taille humaine, revendiquant cette fois une limite de ses jauges (10 000 en journée, 4 500 la nuit), alors que la demande est supérieure, les panneaux “sold out” aux entrées l’attestant aisément. Les années précédentes, le cap des 13 000 pouvait ainsi se franchir aisément.
Cette volonté d’une offre en après-midi de grande qualité, sans réserver les têtes d’affiche aux heures de pointe nocturnes, on l’a retrouve par une programmation ambitieuse, permettant ainsi aux fans du vétéran anglais Luke Slater de le voir en live, sous son alias Planetary Assault Systems, au moment du before. Une heure de rave totale, mêlant les générations pour une prestation intemporelle, prouvant la solidité intergenerationelle du producteur de “Love”.
Nuits Sonores réussit ainsi son rôle de passeur entre les styles, les âges et les curiosités, n’hésitant pas à dédier une nuit entière au hip hop dans toute sa diversité ( avec en conclusion Brodinski, exemple de passage réussi entre électro et trap).
Pas forcément besoin de connaître l’histoire des musiques électroniques pour apprécier Moritz Von Ostwald, le pape allemand de la dub techno, sexagénaire en veste et pochette comme à un mariage, derrière ses machines au Sucre. Il suffit de se laisser bercer par une musique profonde, lancinante et terriblement captivante.
Nul besoin non plus de connaître par cœur le CV impressionnant de Dj Harvey, inaugurant à Lyon sa tournée européenne. L’Americain a fait vibrer avec le sourire un public, dont une partie n’était pas née à l’heure de ses premiers sets. Une house puisant dans tous les titres faisant danser à coup de voix, percussions et claviers jusqu’à plus soif.
Même constat pour le duo The Hacker (présent en spectateur la veille, appréciant comme il se doit Kink en live) et Miss Kittin, héros de l’electro clash des années 90. Les Grenoblois, en terrain conquis, ont déroulé durant une heure et demie (entre un hommage à Depeche Mode qui vient de perdre un de ses membres et un clin d’œil à leur ami Vitalic) une synthèse de leur savoir-faire, comme un voyage dans un passé qui serait toujours très actuel. Les absents ayant la faculté de voir leur date en direct sur Arte…
Dommage toutefois, par rapport au Marché Gare désormais inaccessible, d’avoir des scènes moins amples, aux effets sonores et lumineux forcément réduits. Certaines prestations en pâtissent, même si la proximité avec le public est renforcée. L’idée d’un habillage visuel sur 360 degrés dans le hall 2 de Fagor est en revanche une expérience intéressante, à creuser et prolonger dans un cadre moins impersonnel.
Nuits Sonores avait en outre choisi de s’investir sur un travail de terrain en prévention pour éviter les comportements à risque ou abusifs, à travers affiches, stands et médiateurs. Prouvant aux détracteurs des musiques électroniques, car oui il en existe encore, que faire la fête ne se fait pas à n’importe quelle condition. Et que voir des gens s’amuser, se rencontrer et partager une passion commune peut se faire dès 17 h. A l’heure du thé, en principe, et de la bière (ou un soda) devant un sound system, durant l’Ascension…
Rodolphe Peté