La parole se libère après la publication de “La Familia grande”
Ce week-end Twitter a été le théâtre d’une prise de parole inédite : des dizaines de milliers de personnes témoignaient des violences qu’elles ont subies enfant grâce au #metooinceste.
La publication retentissante du livre La Familia grande de Camille Kouchner, où elle raconte les sévices sexuelles que Olivier Duhamel a fait subir à son frère, a déterré la bête noire française : l’inceste. “La France a un problème avec l’inceste”, affirme Caroline de Haas, figure du combat féministe et membre de l’association #NousToutes au Monde. Le poids du tabou est souvent plus fort que le besoin de s’émanciper du traumatisme : pour cette raison, de nombreuses victimes n’en parlent pas. Pourtant un français sur dix affirme avoir été victime d’inceste.
Des témoignages glaçants
La vague de témoignages serait la plus grande qu’a connue la France selon #NousToutes. Révélatrice d’une souffrance profonde et partagée par des milliers de français, elle doit alerter sur la nécessité de faire des violences incestueuses une priorité pour les pouvoirs publics. Ce mouvement de libération de la parole était nécessaire pour ceux qui n’ont jamais eu le droit qu’au silence. Et il permettra peut-être de changer l’appréhension de l’inceste en France.
#metooinceste
“Moi Elsa violée de mes 6 à 11 ans par mon père. J’ai tout dévoilé en 2014. Avant il m’aimait, maintenant il me traite de folle, de menteuse. Je préfère me suicider le week-end de mes 31 ans, je ne voulais plus souffrir.”
A ma petite sœur ?… pic.twitter.com/bV7JfsP7qD— Zaza (@Zaza81338617) January 16, 2021
J’avais 6 ans, puis 7, 8 et enfin 9 ans lorsque mon frère m’a violé.
Tout ce que je fais aujourd’hui, c’est pour me réconcilier avec l’enfant que j’étais et que j’ai si souvent l’impression d’avoir abandonné… Regarde ce qui se passe aujourd’hui. C’est beau non ?#metooinceste pic.twitter.com/YGnEPojtBY— Laurent Boyet (@assopapillons) January 16, 2021
Souvent isolées, parfois victimes d’amnésie traumatique, les victimes d’incestes ne peuvent pas toujours faire condamner leur bourreau. Pire, la famille ou l’entourage va parfois préférer fermer les yeux plutôt que de dénoncer l’abuseur. L’affaire Duhamel a propulsé la douloureuse réalité de l’inceste sur le devant de la scène : tout le monde savait mais personne n’a rien dit.
L’espoir d’un changement
Le 10 Décembre dernier, le gouvernement a présenté la commission sur les violences sexuelles commises contre les enfants, une instance qui sera composée de magistrats, sociologues et psychologues. Recueillir la parole des victimes pour mieux comprendre et appréhender l’inceste, voilà l’objectif de cette commission. Adrien Taquet, le secrétaire d’Etat chargé de la protection de l’enfance avait souligné l’importance de cette commission qui aura pour but de “faire éclater le dernier tabou des violences sexuelles intrafamiliales”.
Avec le #metooinceste, beaucoup attendait la prise de parole de Adrien Taquet : “Je n’ai pas été surpris. Depuis deux ans, je répète les chiffres à la première occasion, inlassablement.” confie-t-il au Huffington Post “Il faut désormais s’assurer que la parole continue à se libérer et qu’elle ne referme pas.” Il a également affirmé que le gouvernement était en train de réfléchir à différentes propositions de lois. Brigitte Macron, qui avait milité en faveur de la création du secrétariat de la protection de l’enfance, a déclaré Dimanche sur TF1 “Il faut absolument que ces actes soient sus et que ces actes ne soient pas tus”.
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