Claude Régy, le géant de l’ombre, est mort
L’immense metteur en scène français vient de s’éteindre à 96 ans, il laisse derrière lui un rapport unique au théâtre, très marqué par l’esthétique japonaise.
« Metteur en scène, je n’avais rien pour l’être, aucune préparation, aucun ancêtre, rien, le désert. Ce désert sans doute a été mon meilleur allié » (Claude Régy).
Né à Nîmes en 1923, il commence sa carrière comme assistant d’André Barsacq au Théâtre de l’Atelier, avant de penser son art seul. La marque de Régy c’est un certain rapport au vide. Nous ne sommes pas chez Brook ici même si les lumières et les décors s’effacent. Les âmes jouent plus que les corps dans ses spectacles qui installent ceux qui regardent dans une posture d’hypnose.
Au XXIe siècle, la mort était son héroïne. La Brume de Dieu, une création à partir de l’œuvre intitulée Les Oiseaux de Tarjei Vesaas et du même auteur, La barque le soir ou, ce qui restera son dernier spectacle, Rêve et Folie de Georg Trakl, sont toutes des descentes au tombeau.
A Paris, on doit beaucoup au Festival d’Automne qui a montré le travail de Régy dès 1978 avec Elle est là au Centre Pompidou.
Claude Régy a consacré sa vie à la mise en scène d’auteurs contemporains, ouvrant largement un nouveau répertoire dramatique et une nouvelle esthétique scénique. Comme le signalait le Théâtre de la Ville en 2012 à l’occasion d’une rencontre autour de son livre Dans le désordre chez Actes Sud, “Très vite, il s’éloigne du réalisme et du naturalisme psychologique, comme il s’oppose à la simplification réductrice d’un théâtre qui se voudrait politique. Il porte un regard novateur sur de grands écrivains et notamment sur des auteurs anglo-saxons ou scandinaves, dont il crée souvent les textes pour la première fois en France.”
Régy restera pour l’éternité le magicien de la perception, ses spectacles étaient tous comme des rêves dont nous ne savions jamais si ils étaient réels ou non.