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Couturissime ! Immersion dans l’univers de Mugler au MAD

30 September 2021 | PAR Camille Bois Martin

Du 30 septembre au 24 avril 2022, le Musée des Arts décoratifs de Paris fait honneur à la carrière de Thierry Mugler au sein de l’exposition Thierry Mugler, Couturissime aussi grandiose que sublime, toute à l’image du créateur. 

Un univers muglerisé

Le MAD nous offre, à nous commun des mortels, l’opportunité d’admirer quelques-unes des pièces les plus iconiques et intemporelles de la longue carrière du créateur Mugler. Réunissant des silhouettes de certains défilés de 1973 à 2014, l’exposition de ces archives très prisées a nécessité la confection sur mesure de mannequins par la maison Hans Boodt Mannequins de Rotterdam ainsi que la mise en place d’installations immersives.

Voulue comme une immersion dans les collections de la grande maison, cette rétrospective convoque en effet tous les sens de ses visiteurs : les silhouettes du défilé Haute Couture printemps-été 1997 Les Insectes sont plongées dans l’obscurité de la première salle, où sons et images conçus par Rodeo FX transportent le visiteur devenu spectateur dans un voyage vers le monde Mugler. Des bruitages de la nature et d’insectes entourent la fameuse robe fourreau-bustier ailes de papillon brodée de paillettes, reportée par Irina Shayk le soir du vernissage de l’exposition mardi 28 septembre dernier.

Plus loin, une autre salle est muglérisée, plongée dans l’univers imaginé pour la collection Prêt-à-porter printemps-été 1989 Les Atlantes ainsi que la collection Haute couture automne-hiver 1999-2000 Les Méduses. Une robe du soir bustier à double crinoline en organza côtoie un bruitage sous-marin et se noie devant un banc de poissons en arrière-plan. Comble du détail, les mannequins sont accessoirisés de bijoux d’oreille semblables à des branchies ; ou encore, le modèle dit Méduse de bal se pare d’un diadème en forme de coraux. 

Une autre pièce de l’exposition poursuit cette immersion et propose au public de découvrir l’évolution de la gamme de parfums Mugler ; immersion visuelle bien sûr, mais également (et à nouveau) sensorielle, qui convoque ici non pas l’ouïe mais l’odorat. Le visiteur est invité à respirer les créations parfumée de Thierry Mugler en plongeant son nez sous ce qui s’apparente à la fois à un poumon et à une hirondelle.  

Le MAD est muglérisé de la tête au pied : son, vision, émotion… immersion. 

Le premier défilé-spectacle 

Si les vêtements sont un spectacle en eux-mêmes, Thierry Mugler est le premier créateur de mode à avoir organisé un défilé-spectacle, réunissant plus de 6 000 personnes au Zénith de Paris en 1984 pour célébrer les dix ans de la maison. Cette folie du show est en effet intrinsèque à sa carrière puisqu’il réalise, conjointement à ses collections, de nombreux costumes de théâtre : en 1985 pour la comédie musicale Emilie Jolie et l’opéra Nuits d’été, en 1989 pour la tournée Tour 89 de Mylène Farmer. Ou encore pour la Tragédie de Macbeth à la Comédie Française, pour laquelle il conçoit une imposante structure métallique dorée, que l’artiste Michel Lemieux réinterprète en 4D au sein de l’exposition dans une mise en scène spectaculaire.

Finalement, en 2002, le créateur Thiery Mugler quitte sa maison de couture pour se consacrer au monde du spectacle, et devient Manfred Thierry Mugler, son alter ego. Entre 2013 et 2015, il crée la revue Mugler Follies au théâtre Comédia à Paris, revisitant les univers les plus iconiques de sa carrière. Comme il le confie dans un entretien au commissaire de l’exposition Thierry-Maxime Loriot, “je n’ai jamais été un intello qui voulait passer des messages ou briser des codes […]. Mon approche était de proposer l’étonnement, la découverte, des beautés plurielles […].” (Montréal, 2018) 

Thierry Mugler, du créateur au metteur en scène 

La rétrospective rend en effet compte d’un créateur polymorphe, à la fois metteur en scène et photographe de ses créations, qu’il transporte dans des lieux tout aussi époustouflants : le désert, les glaciers du Pôle nord, le toit de l’Opéra Garnier… Thierry Mugler contrôlait tous les aspects créatifs de ses collections. Et si des grands noms de la photographie ont collaboré avec ce dernier, leur part de créativité restait limitée : une citation d’Helmut Newton retranscrite sur un des murs de l’exposition rend compte des difficultés que le créateur imposait à ses collaborateurs, leur intimant de trop nombreuses directives. Finalement, il décide de tout photographier lui-même : en 1988, le livre Thierry Mugler, photographe est publié aux éditions du Regard. 

 

Toujours derrière l’objectif, ce dernier va également scénariser et réaliser le clip Too Funky de George Michael en 1992, pour lequel tous les mannequins portent ses créations. Quelques années auparavant, en 1985, lors d’une séance à l’Assemblée Nationale, c’est le ministre de la culture Jack Lang qui fait sensation dans un costume Mugler en lainage noir à col Mao, faisant abstraction de l’obligation du port de la cravate au sein de l’hémicycle. Ainsi, Mugler a fini par contrôler tous les aspects créatifs de sa carrière – porter du Mugler devient presque toujours un évènement, encore aujourd’hui (avec Cardi B) – jusqu’à en décider la trajectoire, hors de sa propre maison de mode.

Être de son temps, l’épouser et le transformer à la fois, le projeter dans des futurs possibles sans jamais abdiquer sa liberté. C’est ce que Thierry Mugler incarne dans l’histoire de la mode.” – Olivier Gabet, directeur du musée des Arts Décoratifs, in Thierry Mugler, “Mugler à Paris. Thierry Mugler, la mode comme œuvre d’art totale”, 2021

Visuels : © Camille Bois–Martin, Musée des Arts Décoratif de Paris, 28 septembre 2021, Paris

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Camille Bois Martin
Étudiante en Master de Journalisme Culturel (Sorbonne Nouvelle)

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