
Faut-il ressusciter les nuits parisiennes?
Chez Castel, Les Bains Douches …plus que de simple boites de nuit parisiennes, ce sont de véritables institutions qui renaissent au fil du temps. Avec elles, le vent d’une époque souffle et la nostalgie imprègne notre ère. Est-il pourtant indispensable de raviver les mythes?
On dit Paris fini, ses nuits devenues noires et monotones. Pourtant, peu à peu, ses lieux mythiques ré-ouvrent, réinvestis par les nouveaux branchés. Cet hiver, ce seront les fameux Bains Douches (dire maintenant “Les Bains Paris”) qui devraient ouvrir de nouveaux ses portes, se muant en un hôtel de luxe dans l’esprit du Château Marmont à Los Angeles. Créé en 1885, ces thermes privés de luxe accueillaient déjà Marcel Proust. Bien des années plus tard, en 1978, les Bains deviennent un club et une salle de concert tendance rock où chaque personnalité incontournable des années 70-80 semble avoir foulé le pavé 7 rue du Bourg-L’Abbé. De Basquiat à Vanessa Paradis, en passant par David Bowie et Catherine Deneuve, les Bains ont au fil du temps acquit une aura mythique jusqu’à l’épuisement.Souvent ravivés par les médias (la bande de Canal + en tête), mais aussi la littérature ou le cinéma (le récent film de Bertrand Bonello sur Saint Laurent nous fait toucher du bout des doigts ce que fut la décadence du Tout-Paris), les Bains qui avaient déjà perdu de leur éclat ont fermés en 2010 sur arrêt préfectoral. Devenus en 2011 une marque déposée, les Bains abritent une Résidence d’Artistes de janvier à mai 2013, et cet hiver une nouvelle page de son histoire se tournera. Les Bains devraient être “un lieu chic et chaleureux, certes, mais qui sera inventif, hybride, tansculturel, un tantinet bohème et, surtout, d’un concept totalement inédit” expliquait Jean-Pierre Marois, héritier de cet immeuble de famille, au quotidien Le Figaro en 2013.
Les Bains Douches ne furent pas le seul club mythique parisien. Des années 40 aux années 70, au temps où Paris était vraiment un village, St Germain-des-Près imposait son rythme à la nuit. S’y développait une micro-société formée majoritairement d’artistes et de penseurs en vogue (Duras, Gainsbourg, Leiris, Prévert etc.) que l’écrivain Gilles Schlesser a récemment ravivé dans son bel ouvrage Saint Germain-des-Près, lieux de légendes. Parmi ces endroits incontournables, chantés par Jacques Dutronc, Chez Castel ouvert depuis 1962 fait figure de mythe. Enfant de St Germain des Près, Claude H. aujourd’hui retraité paisible en Ariège se souvient de ces heures de gloire du quartier “Chez Castel, c’étaient surtout les riches qui y entraient. On y croisait les grandes stars, de Johnny à Bardot.Mais il y avait d’autres endroits plus accessibles comme le Romeo Club et Le Tabou. On croisait tout le temps les mêmes personnes, il y avait une vraie solidarité dans le quartier, un esprit de bande qui fait écho bouillonnement de mai 68. Il m’est même arrivé de jouer les videurs au Tabou! Certaines figures détonaient vraiment, je me souviens notamment du Baron de Lima un excentrique entouré de sa cour ” Une nostalgie qui transparaît de ces mots, qui anime aujourd’hui certains fêtards de la nouvelle génération qui regrettent le “vrai” esprit Castel et qui ont donc pris la décision de racheter le club.
Au 15 rue Princesse, le club n’a jamais vraiment fermé ses portes, et si s’y frayer un chemin est toujours délicat pour quiconque n’a pas ses entrées. Pourtant il ne restait plus grand chose du Castel mythique depuis que le patron du Queen, Philippe Fatien, l’ait racheté en 1997. Cependant, depuis mi-septembre sous l’impulsion des racheteurs et d’André Saraiva, artiste graffeur mais surtout entrepreneur noctambule (Le Baron et ses variantes, Hôtel Amour, La Fidélité, Le Montana), Castel semble avoir retrouvé son ADN.
D’autres endroits parisiens ont su garder une certaine qualité tout en étant relativement accessibles malgré le temps qui passe, à l’instar du Bus Palladium. Chez Castel, Les Bains, et de manière plus particulière le Silencio ont le charme désuet du snobisme. Est-il nécessaire de redonner vie à des lieux qui ont eu leur heure de gloire ? Au contraire, ne faut-il pas laisser les mythes briller de leur éclat passé ? A l’heure où le brassage est de mise, voire tendance, mettre l’accent sur des lieux réellement ”transculturels”, aussi bien d’un point de vue de la programmation que de la clientèle, serait bien plus judicieux plutôt que de se tourner constamment vers le passé.
Site officiel Les Bains Paris.
Visuels : ©Foc Kan (Les Bains Douches),© Yolande Castel (Chez Castel)
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2 thoughts on “Faut-il ressusciter les nuits parisiennes?”
Commentaire(s)
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Iliana Guiot-Guillin
Heureusement que Paris se tourne constamment vers son passé pour perpétuer la magie et la légende. Chapeau aux gens qui se lancent dans des aventures pareilles
Rolland Alain
Une Capitale qui se tourne vers son passé en espérant avoir un avenir meilleur et y trouver l’ADN de son futur et une Capitale Eteinte !
Paris est depuis trop longtemps cette Capitale Eteinte et ressusciter le passé ne l’aidera pas à se rallumer !
Mais pour autant, il ne faut pas oublier son passé, il faut en être fier et il doit être le terreaux de son avenir !
Alain Rolland