
Théâtre: Jean Bête , une recherche tendre du sens perdu
Le metteur en scène et comédien Antonio Da Silva s’est attaqué à une histoire populaire, celle de Jean Bête, tiré des “Trésors des Contes” d’Henry Pourrat. Jean est l’idiot du village, le fou qui rassure, faisant sentir les autres sains d’esprit. Un conte bien mené, porté par trois comédiens magistraux dans un décor juste.
Dans la maison envahie par les draps qui sèchent, Mémé et Divelio décident de se rendre à un enterrement, ils ne veulent pas s’embarrasser de Jean et le laisse à la maison. Voici notre homme perdant « le sens », il coupe les blés pas encore mûrs, met grand-mémé dans le four, massacre les poules. S’en suivra une quête à la recherche du fameux sens amenant Divelio à entrainer son frère dans un voyage initiatique à la recherche de l’amour.
Antonio Da Silva a rassemblé deux très belles histoires, la première sur la folie, la seconde sur l’entrée dans le monde. Gérard Damervalle, pantalon trop grand et trop remonté campe ce paysan un peu benêt avec brio. Il devient effrayant en glissant dans la démence pure, s’agitant, perdu. Les vieilles dames, portées par Guy Lafrance, se veulent des figures rassurantes, mais, dans ce monde où aucun père n’est présent, Jean est happé par le vide rassurant que procure la démesure. Le metteur en scène relie de façon habile une seconde histoire à la première en imaginant les deux frères partant à la conquête de leur vie, l’objectif étant de trouver une épouse à Jean. L’occasion d’une scène tendre et drôle entre les deux garçons autour d’un picnic un peu maigre…
La belle scénographie repose sur une multitude de draps tendus, on les imagine séchant au soleil ou bien cloisons entre deux vagues chambres. Le travail de lumière réussi amène le public dans des ambiances bien définies de chaleur ou de pluie, de jour ou de pénombre. Les trois comédiens excellent à égalité. Antonio Da Silva offre un personnage nuancé devant être malgré lui l’homme de la maison, alors qu’il aimerait bien voir la ballerine de ses rêves devenir réelle. Guy Lafrance ne glisse jamais dans le travestissement, rendant ces dames imposantes et crédibles. Gérard Damervalle emprunte au mime des visages transfigurés tour à tour par la démence, la naïveté et une immense gentillesse, faisant de son personnage un homme attachant.
Jean Bête est un très beau spectacle à l’écriture exigeante et à la mise en scène exemplaire. Une jolie leçon de vie tout public à découvrir urgemment.
(c) photos: Dominique Versavel.
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